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  • SOS, le groupe qui crée l'Etat Providence Participatif

    SOS est un groupe qui met en oeuvre la plupart des principes que j'ai développé dans ce blog. Coup de chapeau!

    SOS vient d'éditer un livre qui donne un large aperçu de leur action et de leur structure co-organisatrice.

    https://issuu.com/groupe-sos/docs/groupe_sos_livre_35_ans/1?ff

    A lire, absolument par tous ceux qui s'intéressent à l'imbrication du social dans l'économie.

  • Zéro chômeurs, c'est possible et à la portée des communautés de communes

    A lire, absolument, surtout si vous êtes un élu local! Une fabrique à détruire le chômage, en Lorraine.

    Il y a 10 zones d'expérimentation du même type en cours, et 42 territoires étaient candidats.

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  • Le service civique des jeunes et des vieux, une amorce de réponse au besoin de mutualiser le travail social...qui risque de tuer l'idée?

    Le service civique fait l'objet de diverses propositions qui tournent autour du pot de la mutualisation du travail social. La dernière en date est celle de Rama Yade . Cette thèse du service civique des seniors est aussi soutenue par Serge Guérin et Michèle Delaunay dans une tribune dans le quotidien l'Opinion "Mobiliser les seniors".

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  • La norme socio-économique exclusive se meurt mais ne se rend pas!

    Pour une économie inclusive prenant résolument acte des capacités de chacun.

    Développer des structures, des cadres d'activité stables (n'ayant donc pas pour but une réinsertion standard, mais une réinsertion au moyen de l'étayage apporté par ce cadre pérenne) adaptés aux inadaptés du "système", leur permettant ainsi de contribuer à leur mesure, n'est pas encore dans le logiciel de nos élus, ainsi qu'en témoigne le PLF 2013 (Projet de Loi de Finance), concernant la solidarité, l'insertion et l'égalité des chances.

    Malgré des taux de réinsertion des exclus frisant régulièrement le zéro pour cent, dès lors qu'on se penche sur le moyen terme, le tropisme des services sociaux reste l'obsession de la réinsertion dans l'économie standard. C'est ce que nous dit en substance la récapitulation des objectifs et indicateurs de performance, page 18, de ce PLF 2013:

    OBJECTIF 1 Améliorer l’accès à l’emploi [sous entendu emploi standard-ndr] et l’autonomie financière des bénéficiaires du RSA

    • INDICATEUR 1.1 Part des foyers allocataires du RSA sans emploi dont au moins un des membres reprend une activité
    • INDICATEUR 1.2 Part des foyers bénéficiaires du RSA en emploi dont les revenus sont supérieurs à 150% du montant forfaitaire
    • INDICATEUR 1.3 Taux de sortie du RSA pour dépassement de ressources

    OBJECTIF 2 Développer l’accompagnement vers l’emploi des bénéficiaires du RSA (c'est le point qui se rapproche le plus d'une approche inclusive, toutefois, l'accompagnement n'est ici pas destiné à durer, il s'agit toujours du tropisme, illusoire la plupart du temps, de la réinsertion dans la norme, alors que l'étayage, d'un point de vue pragmatique, peut s'avérer nécessaire pour toujours -ndr)

    • INDICATEUR 2.1 Part des bénéficiaires du RSA sans activité inscrits au Pôle Emploi

    La Maison des Sources de Besançon et son association de duplication l'IAF, offrent un exemple d'application à des personnes atteintes de troubles psychiatriques importants, de mise en place d'une structure prenant en compte la réalité de ces personnes, leurs capacités, afin de leur offrir un cadre d'activité et de progression de leur autonomie leur permettant de contribuer à l'économie à leur mesure (éventuellement dans un emploi standard avec l'étayage qu'apporte la Maison des Sources, étayage affectif, administratif et pour tout problème pratique qui se présente) tout en respectant leur liberté.

    Si c'est possible pour des personnes si peu favorisées, il est possible d'imaginer une graduation continue de structures ne laissant personne de côté. Mais pour ça, il faut abandonner notre conception de la normalité*, la tyrannie que cette normalité exerce sur nous et qui se retrouve à tous les niveaux de la façon dont nous mettons en place notre solidarité. Beaucoup de places et de postes de personnes impliquées dans "le social" tel qu'il est aujourd'hui, se sentiront elles-mêmes menacées par un tel  bouleversement, un tel renversement de perpectives (adapter les structures à la réalité des personnes, plutôt que d'adapter les personnes aux structures). Ainsi qu'en atteste la réussite de la maison des sources, c'est pourtant ce renversement de perspectives que nous devrions opérer, plutôt que de continuer à vivre dans le déni et le quasi zéro réinsertion.

    Je suis redevable à Patrick Declerck, pour son remarquable livre enquête/témoignage "Les naufragés", de m'avoir ouvert les yeux sur la nécessité du renversement de perspective de notre approche sociale. Pour qui le lit, son témoignage éclairé et approfondi nous place face à notre déni du fiasco du tropisme réinsertionniste que nous partageons tous plus ou moins à priori.

    *La normalité active est celle de l'individu autonome, norme qui s'est forgée par opposition au sujet d'une communauté. Cette norme nous vient de loin, aux alentours de la révolution avec le décret d'Allarde suivi de la loi Lechapelier. Ce cadre est encore si puissant qu'il nous est difficile de penser nos collectifs, aussi bien ceux qui existent que d'en inventer de nouveaux. La Maison des Sources pose un acte à la fois salutaire et subversif vis à vis de cette norme. Elle ouvre la voie à la mise en place de collectifs modernes (il ne s'agit donc pas ici de refaire les communautés aliénantes dont nous nous sommes extraits depuis la révolution) capables de réduire considérablement l'exclusion générée par la norme individualiste actuelle.

  • Pour un Pacte National d'Innovation Sociale, par Hugues Sibille

    Reprise, avec son accord, d'un billet de Hugues SIBILLE, du 16 Janvier 2013, tribune publiée par ailleurs dans La Croix du mardi 15 janvier 2013. Un billet militant pour une approche sociale contributive, inclusive, innovante, pragmatique (on arrête les initiatives qui ne marchent pas et on duplique celles qui fonctionnent) en phase avec la subsidiarité. Une approche structurante du domaine social en accord avec l'Etat Providence Participatif que je soutiens ici. 

    À situations nouvelles, solutions nouvelles.Nous sommes en stagnation économique et en disette budgétaire. Cessons donc de traiter le social comme une “redistribution”, devenue impossible. Gérons-le comme un investissement dans une nouvelle croissance. Comme un facteur de compétitivité. Avec retour sur investissement pour la collectivité. Un euro public investi dans une entreprise d’insertion évite les coûts du chômage ou de l’aide sociale et génère 2,3 euros de retour dans les caisses publiques par l’impôt et les cotisations. [souligné par mes soins, point qui me semble important pour être entendu de tous ceux qui ne voient que de l'assistance dans une démarche qui se révèle contributive. Je tente d'obtenir plus de détails sur la façon dont ce résultat est calculé] Le même raisonnement vaut pour une coopérative d’activité, qui permet de créer son emploi dans un cadre mutualisé, ou pour le microcrédit professionnel accompagné. Encourageons ces modèles productifs. Généralisons-les lorsqu’ils marchent. Arrêtons-les quand ils ne marchent pas.

    Les besoins sociaux changent avec la société. Les produits et services sociaux, leurs modes d’organisation, les modèles économiques qui les supportent doivent innover. Le rapport du Secours Catholique sur la pauvreté montre qu’en dix ans les coûts énergétiques des plus fragiles ont progressé de 48 % et deviennent insupportables. Innovons pour résorber cette précarité énergétique. De même, l’absence de téléphone mobile devient un handicap majeur à la (re)socialisation. Et le vieillissement massif de la population impliquera de traiter autrement la dépendance, en termes de santé et de logement.

    Pour apporter ces nouvelles réponses, des innovateurs sociaux expérimentent chaque jour. Chêne let crée le logement social éco-conçu. Emmaüs Défis passe des accords avec SFR pour la téléphonie sans fil. Siel Bleu propose une activité physique adaptée aux personnes âgées pour faire de la prévention santé. Habitat et Humanisme crée un concept mélangeant services infirmiers à domicile, centre de jour et centre d’accueil. On peut mesurer l’impact social de ces innovations. Ainsi l’activité physique en maison de retraite fait reculer le diabète et les chutes avec fractures. Sa généralisation représenterait des centaines de millions d’euros d’économie. Sortons ces multiples initiatives de la “marge” où ils sont cantonnés pour en faire le centre de la transition vers une nouvelle croissance inclusive. L’intérêt porté à l’innovation technologique vaut aussi pour l’innovation sociale.

    Les collectivités territoriales commencent à encourager l’innovation sociale. Les régions l’inscrivent dans leurs Schémas Régionaux d’Innovation (SRI) et mobilisent leurs agences régionales d’innovation en Champagne Ardennes, Bretagne, Franche-Comté, etc. Languedoc Roussillon crée un écosystème régional favorable aux innovateurs sociaux avec incubateur, pépinière, école d’entrepreneuriat, système de duplication (Replic)… De son côté, la Commission Européenne a lancé un Programme pour le changement social et l’innovation sociale. La nouvelle programmation du Fonds Social Européen (FSE) pour la période 2014/2020 favorisera cette innovation sociale. Partout, elle émerge comme objet de politique publique à côté de l’innovation technologique.

    Le moment est venu en France d’un Pacte National d’Innovation Sociale qui complète et renforce le pacte de compétitivité, et accompagne le projet de loi sur l’économie sociale et solidaire prévu pour le printemps 2013. Les principes de ce Pacte seraient les suivants :

    - ouvrir à l’innovation sociale les dispositifs de soutien à l’innovation technologique, sans les opposer.

    - privilégier les projets qui transforment des “bénéficiaires” en “parties prenantes”, en acteurs responsables, et mobilisent la société civile, comme le fait Solidarités Nouvelles face au Chômage.

    - encourager les partenariats associations-entreprises, tels que les achats responsables, le mécénat de compétence, le capital investissement d’utilité sociale.

    - faire de l’innovation sociale une priorité des politiques contractuelles État/collectivités territoriales. 

    Ce Pacte serait décliné en un plan pluriannuel avec des objectifs mesurables, par exemple sur les trois rubriques suivantes :

    - financement de l’innovation sociale : ouverture des dispositifs relatifs à l’innovation technologique, mise en place d’un crédit impôt recherche innovation sociale, localisation au sein de la nouvelle BPI d’un Fonds innovation sociale privilégiant les avances remboursables et les systèmes de garanties.

    - création au sein de chaque ministère (logement, santé, environnement, agriculture…) d’une cellule innovation sociale, comme cela existe au Royaume Uni, chargé de favoriser les expérimentations avec la société civile, puis leur diffusion à grande échelle, et mise en réseau interministériel de ces cellules

    - modélisation d’écosystèmes territoriaux de soutien à l’innovation sociale complétant les pôles de compétitivité et réseaux régionaux d’innovation, réunissant les régions qui ont la compétence économique avec les départements qui ont la compétence sociale, et l’état, pour construire des alliances avec les entreprises, associations et syndicats et les universités. 

    Les contraintes des finances publiques ne sauraient conduire nos gouvernants à gérer en simples comptables les coupes budgétaires. Sortir par le haut de cette période anxiogène nécessite de redonner du souffle et de l’imagination aux politiques publiques, de prendre des risques en libérant les forces créatives, de fabriquer de l’estime de soi et de la confiance. Un Pacte d’innovation sociale, reconnu et promu, y contribuerait significativement. 

    Hugues SIBILLE, Ancien Délégué Interministériel à l’Innovation Sociale. Président d’Avise, Vice Président du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire, Auteur de : La voie de l’innovation Sociale, éd. Rue de l’échiquier, 2011.

  • La Maison des Sources, un lieu adapté aux "inadaptés". Un ilôt de résistance à la perversion insertionniste.

    C'était dans le 7 à 8 du 11 novembre 2012, la Maison des sources  est un lieu qui est adapté aux personnes "faibles", "inadaptées", "inemployables" selon notre contrat social excluant et compétitif actuel. Marie Noëlle Besançon, la psy qui a fondé ce lieu a mis en pratique les préconisations que Patrick Declerck formule dans son livre "Les naufragés", à savoir adapter les lieux et les conditions de fonctionnement aux capacités des personnes. Une initiative remarquable qui j'espère va inspirer de nombreuses autres initiatives, en particulier autour des GEM (Groupe d'Entraide Mutuelle). Coup de chapeau à Marie Noëlle pour avoir ainsi su placer concrètement le faible au centre de la Maison des sources et lui permettre ainsi de contribuer à sa mesure.

    On est loin de l'utopie reinsertionniste si courante dans les services sociaux et que dénonce si clairement Patrick Declerck, ce qu'il nomme le Graal des services sociaux. Le lâcher prise des "normaux" qui ouvrent leur regard sur les faibles et leur liberté est émouvant comme une naissance au monde. De mon point de vue, le témoignage qui en rend le mieux compte est Alexandre Jollien dans son éloge de la faiblesse.

    Peut-on rêver que l'esprit qui fonde les GEM et cette réalisation plus complète de la Maison des sources puisse gagner l'ensemble de notre contrat social, à savoir adapter nos conventions sociales, notre contrat social, aux réalités d'autonomie des personnes, ce qui n'est en rien contradictoire avec l'accent mis sur ce développement de l'autonomie (c'est d'ailleurs ce qui se pratique à la Maison des sources où la formation et le champ d'action des membres s'étend au fur et à mesure que leurs capacités qui fondent leur autonomie s'accroissent). On a là une piste de croissance (celle de l'autonomie des personnes) infinie, profitable à tous, inclusive.

    Marie-Noëlle Besançon est aussi la présidente de l'association IAF (les invités au festin, osons une psychiatrie citoyenne!) qui vise à étendre l'expérience de la Maison des Sources.

  • La maison verte de Dolto

    Parmi les réalisations qui relèvent de la démarche de l'état providence participatif, la maison verte de Françoise Dolto pourrait figurer en bonne place. Elle en a toutes les caractéristiques.

    • -Structure collective opérant dans le champ social (on n'y produit rien que du capital social).
    • -Participation active mais très peu contraignante des adultes.
    • -Concourt à réduire l'isolement, à la fois des adultes et des enfants.
    • -Règles de fonctionnement régulant intelligemment le vivre ensemble, la combinaison du je et du nous.
    • -Association de moyens publics et de citoyens.
    • -Conforme avec le "subsidiarisme".

    [La maison verte]..."Un lieu de rencontre et de loisirs pour les tout-petits avec leurs parents. Pour une vie sociale dès la naissance, pour les parents, parfois très isolés devant les difficultés quotidiennes qu’ils rencontrent avec leurs enfants. Ni une crèche ni une halte-garderie, ni un centre de soins, mais une maison où mères et pères, grands-parents, nourrices, promeneuses sont accueillis... et leurs petits y rencontrent des amis." Françoise Dolto

    Liste des maisons vertes

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  • Analyse de l'échec du thème de la société de soin mutuel

    Vous vous souvenez, c'était début 2010, Martine Aubry lançait le thème de la société de soin mutuel. Compte de tenu des réactions très mitigées de la société, on peut rappeler celle de Jacques Julliard (Bisounours et gnia gnia gnia) ou celle de Jacques Attali opposant le soin mutel au respect, ce thème est passé par pertes et profits. Et pourtant c'était une tentative très opportune de développement participatif de l'activité sociale rompant avec le mirage de l'état providence tout puissant. Pourquoi ce thème a t-il fait un tel flop?

    Je vois trois raisons majeures:

    1. -Il s'agit de rompre avec la tradition de notre état social centralisé (Etat Providence) fondé par le sacro-saint CNR (Conseil National de la Résistance) en 1944 et qui a alors actualisé notre contrat social. Toute atteinte à ce système est vécu par la gauche (les gestionnaires des caisses paritaires, qui se vivent comme les gardiens du temple, en particulier) comme une atteinte à l'état social lui-même, alors qu'il s'agit de l'actualiser à nouveau et de l'enraciner populairement.
    2. -Le thème du soin mutuel renvoie à une quasi-Forme de charité propre au centre-droit, à la démocratie chrétienne à laquelle la gauche ne peut s'identifier. Un détour sur la question clé de la gratuité me semble indispensable pour associer l'ensemble des forces solidaires qui peuvent se retrouver dans ce projet de société de soin mutuel.
    3. -En France, on a plus de goût pour les grandes idées et pour chercher le sucre dans le lait chaud que pour les projets terre à terre. Cette question du soin mutuel apparaît donc comme un sujet politique mineur.

    Si cette analyse est juste, il devient alors possible d'imaginer des stratégies permettant de surmonter ces obstacles à cette société de soin mutuel que j'appelle de mes voeux. Je l'appelle de mes voeux parce que la structuration de l'activité sociale, sous la forme d'une mutualisation du travail social, me semble être une des pistes importantes de résolution de l'exclusion qui caractérise notre organisation sociale et que la structuration de l'activité sociale peut à la fois réduire l'isolement et le chômage (Chômage + Isolement  ≡ Exclusion).

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  • Les Voisins Solidaires

    Nul doute que l'association des Voisins Solidaires est une tentative spontanée de structuration du domaine social que j'appelle de mes voeux. C'est tout à fait le type de démarche attendu par l'Etat Providence Participatif. Il s'agit de la création d'une institution par le bas. Le vecteur de la fête des voisins dont le succès est grandissant semble indiquer que cette institution "sauvage" en gestation a toutes les chances de réussir, c'est en tout cas ce que je lui souhaite.

    Et moi, qu'est-ce que je fais dans l'affaire, je me croise les bras? Ben non, d'abord, je soutiens l'initiative et je travaille à consolider, depuis environ 1990, le cadre conceptuel sur lequel cette initiative peut s'appuyer, ensuite j'y participe, mais ça c'est mes oignons. Retour à Tous les articles

  • Apprendre des va-nu-pieds

    Une histoire qui donne du courage.

     

    Comment ne pas relayer cette démonstration de Bunker Roy que les va-nu-peds, donc usuellement considérés comme faibles, inemployables etc recèlent des richesses méprisées. Bunker Roy est sorti du discours ennivrant et stérile qui nous baigne et il nous livre des clés de vivre ensemble enthousiasmantes grâce à son université des va-nu-pieds.

    On entrevoit, au travers de cette expérience, ce que pourrait être une institution qui ne conduirait pas à l'exclusion mais se préoccuperait de faire une place à chacun en fonction de ses aptitudes actuelles, une institution qui se contenterait d'apporter un petit coup de pouce organisationnel et une valorisation de l'existant sans pour autant devenir invasive, sans pour autant déposséder les acteurs.

    Merci à Incognitototo de l'avoir fait découvrir.

  • RSA contre 5h hebdo, du faux Etat Providence Participatif.

    Un projet de loi émanant de "la droite sociale" de Laurent Wauquiez vise à demander une contrepartie de 5h hebdo en travail social contre le RSA, arguant que l'assistanat est le cancer de la société française. Est-ce compatible avec l'Etat Providence Participatif (EPP)?

    Oui et non.

    • Oui, parce que c'est une façon d'apporter de la main d'oeuvre au domaine social qui en manque cruellement et ainsi de le développer.

     

    • Oui, parce que l'Etat-Providence ne peut pas tout et que rien n'est gratuit.

     

    • Non, parce que cette proposition stigmatise ceux qui sont déjà le plus en difficulté, alors que le projet de l'EPP vise au contraire à ce que chacun puisse avoir le choix, soit de contribuer en temps au travail social contre un abaissement de ses contributions en argent à l'Etat Providence, soit de contribuer en argent comme c'est le cas aujourd'hui. Cette façon de stigmatiser les plus en difficultés (noter le choix du terme d'assistanat plutôt que celui d'assistés) est bien dans la manière de la droite actuelle qui ne propose que des solutions simplistes ayant tendance à amplifier les divisions de la société alors que c'est de l'inverse dont on a le plus besoin. Interview de Nicolas Duvoux, auteur de "l'autonomie des assistés" PUF 2009 démontrant que le cancer serait plutôt le chômage de longue durée.

     

    • Non, parce que cette proposition ne crée aucune aspiration des inactifs vers le marché du travail, contrairement à la proposition de contrat mixte qui est un des piliers de l'EPP.

     

    • Non, parce que l'esprit et la méthode de l'état providence participatif est de permettre un développement de l'auto-organisation dans le domaine social. Le mode de fonctionnement le plus fréquent du domaine social est de prendre des décisions pour ceux qui sont en difficultés, augmentant encore leur dépendance et leur difficulté à participer aux choix qui les concernent. Bref, leur vie leur échappe et on ne trouve rien de mieux que de décider encore plus pour eux et à leur place, alors quil est possible de leur donner les moyens de reprendre le contrôle, de promouvoir l'auto-organisation. L'organisation sociocratique ou socio-organisation me semble particulièrement adaptée au domaine social, pour que nous ne considérions plus les personnes en difficulté comme des choses économiques pesantes, mais comme des personnes à part entière dont le dynamisme, le "je", compte. Je fais même le pari que cette approche est économiquement favorable.

     

    • Martin Hirsch pointe que cette proposition va conduire à ce que les obligés du RSA vont "piquer" des emplois à ceux qui sont payés pour faire ce travail social. C'est en effet ce qui risque de se produire. Pourquoi n'en serait-il pas de même avec l'EPP? Parce que dans le même temps, l'EPP créée des emplois dans le domaine productif par l'effet de redistribution d'activité (cf lien ci-dessus). Dans le schéma de l'EPP, tout le monde fait "du social" (ou cotise) et tout le monde fait "du productif".

    Voilà que Laurent Wauquiez remets ça en Octobre 2011 avec les logements sociaux qu'il propose d'attribuer en premier à ceux qui travaillent. J'imagine qu'il sert de poisson pilote à je ne sais quel requin?

    Novembre 2011: finalement, les 5h ou 7h sociales hebdo demandées aux titulaires du RSA seront payées, ce qui améliore sensiblement la proposition initiale qui voulait imposer ces heures contre le RSA. Il n'y a plus qu'à étendre cette possibilité à tous (chômeurs, titulaires d'un emploi...) pour que cette proposition se rapproche de l'Etat Providence Participatif et ne stigmatise pas une population déjà en grande difficulté.

    Décembre 2011. Le discours de Laurent Wauqiez qui s'appuie sur son essai sur "La lutte des classes moyennes" me semble se rapprocher beaucoup des thèses que je défends ici (Autonomie, participation, contribution, offrir une place plutôt que se contenter d'une allocation...) et de ce fait s'éloigne des thèses de la droite-prison (j'ai lu ce terme de droite-prison sous la plume de Nicolas Bedos et je trouve qu'il répond assez bien à celui de gauche bobo). La droite-prison, c'est la droite parano qui stigmatise les uns (les plus faibles), parle d'assistanat plutôt que d'assistance, veut surveiller et punir... Toutefois, Laurent Wauquiez n'en est pas encore à faire le pas de mettre le faible au centre de sa réflexion politique, il s'agit de droite sociale qui porte en elle la contradiction idéologique suivante: elle créé les conditions de l'assistanat en mettant la force et le fort au centre de ses préoccupations tout en croyant pouvoir faire une place à chacun. Encore un petit effort Monsieur Wauquiez, mais je vais suivre votre parcours de près pour les années à venir par curiosité, pour voir l'effet de cette contradiction sur, soit vos contorsions pour vivre avec, soit votre changement de paradigme afin de résoudre cette contradiction.

    ATD quart-Monde tord le cou aux idées reçues sur l'assistanat, les fraudes aux prestations, la pauvreté... de quoi largement décrédibiliser les thèses de la droite sociale.

  • La démocratie est sensible

    La chronique "les idées claires" de Julie CLARINI intitulée "la démocratie est sensible"est centrée sur le "care" et "l'empowerment" (L'Etat-Providence Participatif serait quand même plus joli! Décidément il devient urgent de trouver notre vocabulaire propre pour parler de ces questions) . Cette chronique fait écho au livre "Pour changer de civilisation" que Martine AUBRY publie chez Odile Jacob. Il s'agit en fait d'un livre à plusieurs mains puisque 50 chercheurs et citoyens y ont participé. Ce livre fait une place importante au principal objet de ce blog, à savoir, redistribuer l'activité en organisant le pôle social par le bas+le haut plutôt que seulement par le haut (l'état providence ne peut pas tout en somme). Je ne vais pas bouder ce livre qui montre que Martine AUBRY a de la suite dans les idées et qu'elle ne s'est pas laissée impressionner par le flop de son lancement de "la société du soin mutuel" du début 2010. Elle a d'ailleurs pris soin de juxtaposer soin et respect, sans doute en réponse à l'opposition artificielle qu'Attali fait entre ces deux termes dans un des articles sur son blog: le soin ou le respect?

    Le quatrième de couverture ne dit pas grand chose si ce n'est des idées générales, je ferais un billet plus détaillé quand j'aurais lu ce livre. Pour le moment, je m'en tiens à la chronique de Julie CLARINI.

    Les auteurs de ce livre:

    Martine Aubry avec Philippe AIGRAIN, Philippe ASKENAZY, Maya BACACHE-BEAUVALLET, Olivier BEAUD, Ulrich BECK, Alain BERGOUNIOUX, Loïc BLONDIAUX, Serge BOSSINI, Dominique BOURG, Laurent BOUVET, Juan BRANCO-LOPEZ, Fabienne BRUGÈRE, Alain CAILLÉ, Daniel COHEN, Stefan COLLIGNON, Marie DURU-BELLAT, Guillaume DUVAL, Catherine FIESCHI, Frédéric GILLI, Serge GUÉRIN, Stéphane HALLEGATTE, Françoise HÉRITIER, Ernst HILLEBRAND, Romain HURET, Daniel KAPLAN, Djamel KLOUCHE, Guillaume LE BLANC, Jacques LÉVY, Guillaume LIEGEY, Yves LION, Paul MAGNETTE, Vincent MICHELOT, Laurent MUCHIELLI, Arthur MULLER , Christian PAUL, Dominique PERRAULT, Camille PEUGNY, Thomas PIKETTY, Vincent PONS, Pierre ROSANVALLON, Saskia SASSEN, Patrick SAVIDAN, Jean-Michel SEVERINO, Henri STERDYNIAK, François TADDEI, Vincent TIBERJ, François VATIN, Emmanuel WALLON, Henri WEBER, Patrick WEIL, Michel WIEVIORKA et Faïza ZEROUALA.

     

    Je relève le texte de Serge Guérin "Les révolutions de l'âge, un levier pour rajeunir l'action publique" qui révèle une position politique très proche de celle que je développe ici. Je me demande comment j'ai pu passer à côté de cet auteur.

  • La gratuité ou le paradoxe de la sainteté.

    "Désintéressé et fier de l'être", cette expression contient et exprime tout le paradoxe de la gratuité.

    Lors de l'élaboration de l'Etat Providence Participatif, il m'avait semblé qu'une source d'énergie qui faisait fonctionner les humains et sur laquelle on pouvait compter était la reconnaissance. Je ne parle pas ici de la reconnaissance de ce que l'on est, de la reconnaissance identitaire, mais de la reconnaissance de ce que l'on fait, la gratification qu'on peut recevoir en échange de l'énergie qu'on dépense pour la collectivité. Sans le savoir, j'avais pris une option qui s'inscrivait dans le courant solidariste laïc de Léon Bourgeois et de ce fait, je me suis trouvé en opposition avec les tenants de la gratuité. Pendant le débat qui a précédé celui où je participais et qui s'intitulait "Le care et la critique des inégalités" avec Alice Le Goff et Marie Garrau, un des auditeurs a clairement relevé cette opposition entre gratuité et reconnaissance qui parcourait les deux approches du travail social.

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  • Les sapeurs pompiers volontaires au secours du care

    Les sapeurs pompiers sont des acteurs du care d’un type un peu particulier, majoritairement masculins, mais ils répondent à tous les critères qui définissent le care. Selon la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 leur mission de sécurité civile consiste à assurer « la prévention des risques de toute nature, l’information et l’alerte des populations ainsi que la protection des personnes, des biens et de l’environnement contre les accidents, les sinistres et les catastrophes par la préparation et la mise en œuvre de mesures et de moyens appropriés relevant de l’État, des collectivités territoriales et des autres personnes publiques ou privées ». La distance de cette définition à celle que donne Joan Tronto du care est faible: Le care est « une activité générique qui comprend tout ce que nous faisons pour maintenir, perpétuer et réparer notre « monde », de sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible. Ce monde comprend nos corps, nous-mêmes et notre environnement, tous éléments que nous cherchons à relier en un réseau complexe, en soutien à la vie » (p. 143 de son livre, Moral Boundaries : a Political Argument for an Ethic of care, publié en 1993, traduit en français sous le titre, Un monde vulnérable, pour une politique du care).

    Un projet de loi visant à définir et protéger le statut de SPV a été déposé le 18 novembre 2010 sous le numéro 2977 par le député «rural» Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, soutenu par une cinquantaine de députés UMP. Le dossier législatif. La loi votée en 2011.

     Le texte exposant la motivation du projet de loi est un peu long, mais il mérite d’être cité in extenso, car il montre à quel point les principes de solidarité qui définissent notre pacte social traversent notre clivage politique gauche-droite et à quel point ce domaine de la solidarité a besoin d’évoluer et d’exister légalement:

    EXPOSÉ DES MOTIFS

    MESDAMES, MESSIEURS,

     La loi n° 2004-811 du 13 août 2004 a défini la sécurité civile comme ayant pour « objet la prévention des risques de toute nature, l’information et l’alerte des populations ainsi que la protection des personnes, des biens et de l’environnement contre les accidents, les sinistres et les catastrophes par la préparation et la mise en œuvre de mesures et de moyens appropriés relevant de l’État, des collectivités territoriales et des autres personnes publiques ou privées ». Elle a en outre clairement rappelé que les missions qui en relèvent « sont assurées principalement par les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires des services d’incendie et de secours ».

     Ces principes concrétisent ainsi une véritable originalité dans les compétences conférées aux pouvoirs publics, en confirmant la sécurité civile comme une compétence partagée entre l’État et les collectivités territoriales, qu’il s’agisse des missions accomplies au quotidien (secours de proximité, secours à personnes, etc.), de la gestion des grandes catastrophes (tempêtes, inondations, grands incendies…), des moyens matériels et des moyens humains.

     Plus particulièrement, les secours et la lutte contre les incendies dans notre pays sont majoritairement assurés par les services départementaux d’incendie et de secours (3,65 millions d’interventions en 2009 sur un total de 4,25 millions, 11 644 interventions par jour soit 1 toutes les 7,4 secondes), auxquels il convient d’ajouter les corps communaux et intercommunaux de sapeurs-pompiers, qui disposent de sapeurs-pompiers professionnels (40 100) et de sapeurs-pompiers volontaires (196 800 en 2009, 207 000 en 2004), lesquels accomplissent leurs missions en pleine complémentarité. Ce sont ainsi 3 077 500 victimes qui ont été prises en charge en 2009.

    Ce rapide exposé permet tout à la fois de constater toute l’importance pour notre Nation de disposer d’une organisation adaptée et efficace en matière de sécurité civile et plus précisément de secours, mais également toute la place occupée au quotidien dans la sauvegarde et la protection des populations par les sapeurs-pompiers volontaires (79 % des sapeurspompiers, 96 % des personnels du service de santé et de secours médical, 68 % du temps passé en intervention, 80 % dans les zones rurales), lesquels, sans oublier tous les autres acteurs impliqués, constituent bien la première force mobilisable en tout point de notre territoire pour répondre aux obligations d’assistance et de solidarité qu’imposent le contrat social et les valeurs républicaines que nous partageons.

    Par ailleurs, chacun reconnaît également que l’évolution et les contraintes de nos sociétés modernes, qu’elles soient sociale, économique, démographique ou territoriale notamment (désertification rurale, mouvements vers les zones périurbaines, éloignement entre le domicile et le lieu de travail, concurrence internationale et rentabilité économique, place et développement de l’individu et de la famille, etc. ), rendent de plus en plus difficile l’expression de ces valeurs, la participation citoyenne au service de la communauté.

    Et ces valeurs républicaines, cette participation citoyenne, justement, sont l’essence, le fondement même du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers : don de soi, engagement désintéressé au profit de la communauté, volonté de rendre service, primauté de l’intérêt collectif sur l’intérêt personnel, solidarité et esprit de corps.

    Néanmoins, malgré de nombreuses mesures ou initiatives, nationales ou locales, prises en faveur du volontariat, ce dernier reste confronté à d’importantes difficultés, rendant de plus en plus compliqué son exercice, de plus en plus problématique son développement.

    Afin de mieux appréhender la complexité de cet environnement et d’actualiser la connaissance du volontariat en France, et ainsi mieux rechercher et dégager les solutions les plus adaptées, le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités locales a décidé et annoncé le 4 octobre 2008 à l’occasion du congrès annuel de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, la mise en place d’une commission « ambition volontariat » chargée de travailler de manière prospective sur tous les aspects du volontariat chez les sapeurs-pompiers.

    Installée le 2 avril 2009, cette commission, présidée par M. Luc Ferry, ancien ministre, et composée de représentants des services de l’État, des élus, des sapeurs-pompiers, des organisations du monde du travail et d’universitaires a examiné successivement les problématiques du volontariat selon six grands thèmes : les valeurs républicaines, les liens avec le territoire, la jeunesse, la famille, les relations avec les entreprises et la formation.

    Complétée par une étude externe sur la sociologie du volontariat chez les sapeurs-pompiers, menée par l’équipe « Mana Larès », les travaux de cette commission ont abouti à un rapport remis le 17 septembre 2009 au ministre de l’intérieur.

     

    Ce rapport, après avoir rappelé le contexte dans lequel servent les sapeurs-pompiers volontaires et les importantes évolutions qui l’ont marqué depuis une vingtaine d’années, présente une série de recommandations et de propositions regroupées en trois grands domaines :

    le management des sapeurs-pompiers volontaires, management qui englobe aussi bien leur recrutement, le suivi de leurs activités et de leur disponibilité ainsi que les relations avec les employeurs ;

    – la formation, sujet sensible en termes d’exigences et de programmation des activités

    – la reconnaissance de l’engagement des volontaires, facteur essentiel de leur fidélisation.

    Il propose enfin des mesures plus générales, de portée législative, visant à clarifier et à conforter la place du volontariat dans notre dispositif de sécurité civile, lesquelles sont la source de la présente proposition.

    Prolongeant ces premiers travaux d’analyse importants, un groupe de travail a été constitué dès décembre 2009 afin cette fois de préciser les mesures concrètes à mettre en œuvre. Plus précisément, il était chargé de mobiliser l’ensemble des partenaires, de traduire le rapport de la commission « ambition volontariat » en termes d’objectifs, de mener les réformes nécessaires et de mettre en place les indicateurs d’action et de résultat.

    De tous ces échanges et débats, tout au long de ces dix derniers mois, se confirme l’existence de nombreuses et diverses difficultés auxquelles est confronté le volontariat (directive européenne relative au temps de travail, problème de disponibilité notamment des personnels des services publics locaux, sollicitation de plus en plus forte, problème d’effectif en journée, problèmes en milieu rural et rurbain, contraintes professionnelles ou familiales, importante rotation des effectifs, amélioration lente de la fidélisation) et il importe à présent d’apporter des éléments de réponses, des solutions.

    Si toutes les mesures ou actions qu’il convient à présent de prendre en compte ne relèvent pas du domaine législatif, en revanche, force est de constater la nécessité d’y avoir recours sur certains points essentiels, pour la pérennité du volontariat lui-même, mais aussi pour la sécurité civile.

    En effet, la législation européenne actuelle sur le temps de travail et sa jurisprudence font peser sur l’activité de sapeur-pompier volontaire un risque sérieux de requalification, en reconnaissant au sapeur-pompier volontaire la qualité de travailleur, conduisant alors à une application de règles relevant de la législation du travail, et notamment l’obligation d’un repos quotidien, aux conséquences dramatiques pour son existence comme pour celle de notre modèle de sécurité civile. Il appartient certes aux institutions européennes d’apporter des solutions, mais le législateur national doit lui aussi intervenir et reste compétent pour clarifier cette question.

    Jamais jusqu’à aujourd’hui, le Parlement n’a eu l’opportunité de consacrer l’activité de sapeur-pompier volontaire, le sapeur-pompier volontaire lui-même, comme il est depuis toujours, comme il est tous les jours, c’est-à-dire de reconnaître sa vraie et juste nature, d’inscrire dans la loi que l’activité de sapeur-pompier volontaire est bien une participation citoyenne active aux missions de sécurité civile, et non une activité professionnelle, quelle qu’elle soit. Toujours assimilé, soit à un agent public, soit un collaborateur occasionnel, situations juridiques inadaptées à sa réalité, il ne fait pourtant aucun doute que ses particularités et son originalité l’en éloignent.

    Cette reconnaissance et cette affirmation de l’engagement citoyen en qualité de sapeur-pompier volontaire qu’il est demandé au législateur d’inscrire dans la loi sont bien là le cœur même de cette proposition de loi, et marqueront de leur empreinte solennelle la véritable ambition pour le volontariat d’aujourd’hui et de demain en apportant un cadre juridique protecteur à cet engagement. Par la même, il s’agit bien aussi de renforcer et de consolider la complémentarité entre sapeurs-pompiers professionnels et volontaires qui, avec les principes de subsidiarité et de compétence de sécurité civile partagée entre l’État et les collectivités territoriales, fonde toute l’originalité et l’efficacité du modèle français d’organisation et de gestion des secours.

    En outre, en inscrivant formellement ces nouveaux principes, le législateur viendra utilement combler une lacune dans l’architecture légale de ce modèle d’organisation, puisque dans ce dispositif seuls les sapeurs pompiers volontaires ne disposent pas d’un cadre légal complet et adapté précisant clairement les règles destinées à leur être appliquées, malgré la loi n° 96-370 du 3 mai 1996.

    Il faut également souligner que le volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers ne peut pas uniquement se résumer à des aspects opérationnels. Son histoire est en effet intimement liée à celle de la construction de la sécurité civile et de l’organisation des services d’incendie et de secours. Il peut notamment être rappelé le rôle majeur assuré par le réseau associatif des sapeurs-pompiers, né il y a plus de cent trente ans, souvent à l’origine des plus importantes réformes mises en place et même des œuvres sociales pour les veuves et les orphelins de la corporation. Ainsi, et depuis toujours, un centre d’incendie et de secours n’existe pas sans son amicale de sapeurs-pompiers, lieu privilégié de fraternité, de solidarité, de convivialité et de réconfort dans les moments difficiles, fréquents malheureusement dans le monde des sapeurs-pompiers. Autre aspect de la complémentarité entre sapeurs-pompiers, ce réseau construit avec le temps est depuis longtemps présent dans tous les départements, y compris en outre-mer, ainsi qu’au niveau national, avec ses 98 unions départementales et la fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Participant à la défense des droits des sapeurs-pompiers, comme de leurs valeurs et à l’expression de leur voix auprès des pouvoirs publics, ce réseau associatif des sapeurs-pompiers, partie intégrante de l’identité des sapeurs-pompiers et indissociablement lié avec le service, doit donc lui aussi, comme le volontariat, être reconnu et consolidé.

    Enfin, pour exprimer toute la reconnaissance de la Nation à l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires qui se dévouent pour la communauté, et ce bien au-delà même de la seule période de leur activité, une mesure de justice sociale est proposée afin de procéder, dans un délai de cinq ans, à l’alignement de l’ancienne allocation de vétérance sur l’allocation de fidélité instituée par la loi du 13 août 2004, permettant ainsi de rétablir une équité dans les prestations servies lors de la cessation d’activité.

    Dans le prolongement même de la reconnaissance de l’engagement citoyen, les autres mesures qui vous sont proposées et qui traduisent les conclusions adoptées par les représentants de la commission « ambition volontariat » tendent à apporter des ajustements et des assouplissements adaptés et nécessaires à l’activité des sapeurs-pompiers volontaires, en particulier en confortant la protection pénale des acteurs de la sécurité civile, à poursuivre l’amélioration de leur protection sociale, faciliter et développer le volontariat notamment dans le milieu rural, en donnant les moyens de renforcer la place et soutenir le rôle essentiel des communes et des établissements publics de coopération intercommunale pour le volontariat, et par la même à contribuer à conforter les moyens et les capacités de sécurité civile pour assurer, en tout point du territoire national, la protection des populations. »

     

    Tous les éléments de ce que j’ai appelé l’Etat Providence Participatif y sont, appliqués au cas particulier de la sécurité civile. En effet, on ne peut imaginer la mise en place d’une concurrence pour cette activité qui réclame une couverture du territoire justifiant une coordination nationale. D’autre part, la structuration hiérarchique se comprend par la nécessité de répondre rapidement aux urgences auxquelles les pompiers doivent faire face.

    J’ai entendu la parole de la fondatrice du planning familial, Evelyne Sullerot, lors de l’émission « Les matins » sur France culture, le 11 Novembre 2010, lorsqu’elle a dit avoir connu 3 catastrophes humaines : l’affreuse condition des femmes au début du siècle, avant la révolution de la contraception, les hommes malmenés lors de la dernière guerre et enfin dit-elle, la condition actuelle des enfants. Lorsque cette grande dame juxtapose la condition actuelle des enfants sur le même plan que les deux autres grandes souffrances humaines dont elle témoigne, j’ai tendance à tendre l’oreille. D’autant plus que son diagnostique est partagé par François NICOLAS qui a repoussé les dealers de son quartier avec un collectif anti-crack en 1 an, là où les pouvoirs publics échouaient depuis longtemps.

    On peut imaginer que la prise en charge de l’enfance puisse être considérée autant que le sauvetage des SPV. On peut imaginer des crèches animées par un corps mixte de professionnels et de volontaires, de la même façon qu’on sait le faire pour les pompiers. Toutefois, à la différence des pompiers, cette activité est routinière et ne réclame pas une couverture nationale organisée par l’état ni une hiérarchie si rigoureuse. On peut très bien imaginer laisser la société civile s’auto-organiser sur ce secteur qui pourrait ainsi comporter une certaine concurrence stimulante, pour peu qu’on lui en donne les moyens. Le statut de SCIC (Société Coopérative d'Intérêt Collectif) peut être particulièrement bien adapté à ces activités sociales. Il en va de même pour les ados laissés à eux-mêmes, le soin social aux personnes âgées, aux handicapés, la prévention de l’addiction, de la délinquance. Tout le domaine social a besoin d’être reconnu pour ce qu’il est, ni une activité familiale, ni une activité entrepreneuriale, ni une activité relevant exclusivement de l’état, mais une participation citoyenne au travail social. C’est exactement le projet politique que porte l’Etat Providence Participatif.

  • Citéphilo

    Le 23 Novembre 2010, répondant à l'invitation d'Alain Lhomme, votre serviteur a participé à Citéphilo à une conférence-débat avec Geneviève Fraisse et Jean Gadrey sur le care (prononcer caire). Citéphilo est un évènement philosophique annuel dont le cru 2010 est le 14ème du genre. Une centaine de conférences et débats s'y tiennent entre le 5 et le 28 novembre à Lille et ses environs.

    Voici l'annonce du débat et en lien l'enregistrement (page 7):

    « Soin mutuel » ou nouvelle forme de division sociale-sexuelle du travail ?

    De 18h à 20h 
    Palais des Beaux-Arts - grand auditorium - Place de la République – Lille

    Par delà les polémiques suscitées par la tentative de fonder tout un programme politique sur la notion de "soin mutuel" ou de « care », il semble utile de réinscrire les questions ainsi mises en avant dans le cadre d'une réflexion sur les formes actuelles de la division sociale du travail, particulièrement dans sa dimension sexuée.La pensée économique dominante peine à faire leur juste place à toutes les activités (soin, entretien, assistance, éducation) qui, quand elles ne sont pas prises en charge dans le cadre d’un service public, sont généralement cantonnées dans la sphère privée ou gérées via d’équivoques politiques de développement des « services à la personne », pérennisant des inégalités, particulièrement de genre.Dans ces conditions, il peut paraître séduisant de réfléchir à des dispositifs qui permettraient de mobiliser de nouvelles formes d’un temps actif socialisé. Mais cette idée généreuse risque alors d’occulter la dimension proprement socio-économique de ce qui demeure un travail. Dont la reconnaissance exige, non seulement une action publique valorisant des activités aujourd’hui déqualifiées, mais de plus la prise en compte de sa dimension sexuée, trop souvent passée sous silence..
     
    Le débat a été stimulant et est sorti des jalons habituels du care, invitant à mieux définir cette notion et se l'approprier, la franciser. Je vais tenter de metter à profit cette expérience pour approfondir et préciser le projet d'Etat Providence Participatif.
     
  • La société du soin mutuel pour occuper le terrain, faire de la prévention et contre la société de l'agression mutuelle et de la punition, une révolution conceptuelle qui n'a rien à voir avec les bons sentiments.

    Après les 30 glorieuses de Jean Fourastié, pendant que l'économie poursuit son chemin tourmenté, peut-être dans l'attente de la révolution conceptuelle dont un point d'orgue serait « l'interdiction des paris sur les variations des prix » prônée par Paul Jorion, le Parti Socialiste présente son projet de « société du soin mutuel » sans faire beaucoup de bruit jusqu'ici. Et pourtant, ce n'est pas tous les jours que nous assistons à une révolution conceptuelle majeure en politique (Cf par exemple l'interview de Sandra Laugier et Pascale Molinier dans Raison-Publique). Quand Lionel Jospin, alors premier ministre, avait dit à juste titre « l'Etat ne peut pas tout » au sujet de son impuissance à empêcher la fermeture d'une usine, il avait subit les foudres de ses supporters habituels. « L'Etat Providence ne peut pas tout » pourrait servir d'introduction à la nécessité de la société du soin mutuel. Pour l'essentiel, il s'agit de faire en sorte que chacun y trouve son compte à prendre part au travail social dont toute société à besoin et ne plus seulement s'en remettre aux femmes ou à l'Etat Providence.

    Quand l'Etat Providence a été mis en place au sortir de la guerre, les familles étaient nombreuses et les femmes étaient en majorité au foyer. On a pu croire pendant un temps qu'il suffisait de ponctionner une part des richesses créées par le domaine productif et de la redistribuer au domaine social pour que la solidarité soit efficace et que nous fassions ainsi société. Petit à petit, les familles sont devenues moins nombreuses et les femmes ont quitté le foyer pour le marché du travail. Avec le vieillissement de la population, cette mutation a rendu de plus en plus inefficace et coûteux le principe de l'Etat Providence. Les 35h, qui sont une tentative de mise en forme du projet utopique et creux de « Société du temps choisi » ou « Société du temps libre »*, n'ont rien changé à cette situation de jachère sociale, qui plus est en fragilisant le socle économique de l'Etat Providence, parce que les heures dégagées par les 35h n'ont pas été réinvesties dans le domaine social et que les femmes continuent de porter l'essentiel de ce travail social en plus de leur travail rémunéré.

    Martine Aubry est bien placée pour savoir que les 35h n'ont pas eu beaucoup d'efficacité sociale. Est-ce que sous sa direction le parti socialiste va enfin pouvoir sortir de l'impasse de l'Etat Providence pour emprunter celui de la société du soin mutuel sans renoncer à l'essentiel de l'Etat Providence? Il est certain que cette révolution conceptuelle peut lui redonner une bonne longueur d'avance sur la droite qui s'enferre dans sa vision mortifère de « société de l'agression mutuelle ».

    On peut rendre hommage au musicien François NICOLAS qui, avec  une philosophie très proche de celle de la société de soin mutuel, a repris la rue aux dealers de son quartier en un an en créant un collectif anti-crack. Sans prétendre se substituer aux pouvoirs publics, sans se comporter comme une milice, il a occupé le terrain, avec un groupe de pères soucieux du devenir de leur progéniture, et a ainsi réussi à se réapproprier la rue. Le fait qu'il se soit ainsi heurté à la drogue n'est pas anodin. La prise de pouvoir des dealers sur la rue n'est qu'une concrétisation aigüe du vide social que l'Etat Providence n'a pas pu combler. Sans une participation massive, populaire à la vie sociale, le nihilisme, dont la drogue constitue une des manifestations, occupe le terrain vacant.

    Depuis les années 90, je tente de développer un modèle social de la même famille que celui de la société du soin mutuel, d'abord sous le nom de solidarité libérale, puis sous celui d'Etat Providence Participatif et je ne vais donc pas bouder mon plaisir, d'autant que cette dénomination de société de soin mutuel me semble plus réussie. Ce concept de société du soin mutuel rompt à la fois avec l'utopie de l'Etat tout puissant et avec celle de la société du temps choisi. L'Etat ne peut pas tout, l'Etat Providence non plus, mais la société du soin mutuel peut nous venir en aide, ainsi que l'a démontré François NICOLAS pour la drogue.

    François NICOLAS nous donne une définition de la société de soin mutuel avec sa vision de la prévention: « La prévention n'est pas affaire véritable des pouvoirs publics mais affaire de tout le monde, de tout un chacun, d'un père ou d'une mère, d'un frère ou d'une sœur, d'un ami ou d'un copain, d'un éducateur ou d'une fiancée, de tel groupe sportif ou de tel collectif musical, etc. La prévention est affaire de la société, nullement de l'état, lequel chaque fois qu'il se mêle de prévention en matière de drogues - et il le fait beaucoup trop aujourd'hui - le fait très mal : en « instruisant » des différences entre cannabis et héroïne, en en appelant à la peur du gendarme et aux risques encourus (là où le jeune est précisément en quête bien compréhensible de nouveaux risques à affronter) alors que toute prévention véritable de la drogue doit surtout montrer qu'il y a pour un jeune aujourd'hui en France beaucoup plus intéressant à faire qu'à se droguer, qu'il n'est pas condamné à ne rien vouloir ».

    Le projet de société du soin mutuel n'a pas grand chose à voir avec les bons sentiments ainsi que le qualifient certains opposants à ce projet qui tentent ainsi de le dénaturer et de le dévaloriser. Ce qui est en jeu concerne la prise en charge sociale autrement que par délégation. La crise financière que nous traversons occulte en grande partie la crise de modèle socio-économique qui s'approfondit. Cette crise socio-économique est pointée par de nombreux analystes. Elle provient du fait que nous devons en même temps réduire le chômage, c'est à dire redistribuer l'activité, dans une optique de développement durable et non plus dans une optique de croissance infinie. La mise en place d'un projet de société du soin mutuel est capable de résoudre cette équation en opérant un transfert d'activité vers les besoins sociaux sans pour autant grever encore plus le budget de l'Etat. Nous attendons à tort que l'état s'occupe du soin social et de la prévention alors que c'est l'affaire de tous. C'est un peu comme si on attendait que l'arbitre fasse aussi le jeu dans une rencontre sportive. C'est là qu'est l'enjeu de la société de soin mutuel et non dans une question de bons sentiments. Un des autres gros enjeux de la société de soin mutuel, c'est qu'elle offre une occasion de réduire fortement la "domination masculine" ou les inégalités liées au sexe grâce à la redistribution d'activité.

     

    *"La société du temps choisi", dont André Gorz était une fervent défenseur, était une tentative de résolution de l'équation de redistribution de l'activité dans une perspective durable, redistribution inéluctable compte tenu des énormes gains de productivité que tous les secteurs ont connu et qui induisent des mutations considérables de la main d'oeuvre (par exemple le dernier exode rural en France, entre 1945 et 1975, le pourcentage d'agriculteurs est passé de plus de 1/3 à moins de 4% des actifs). C'était sans compter sur le fait que presque personne ne ramassera un papier gras ou un mégot spontanément s'il n'est pas soutenu par un quelconque cadre juridique, par une quelconque reconnaissance. C'est celui qui jette ses papiers gras ou ses mégots n'importe où qui donne le la, qui impose sa norme, sans une organisation efficiente de la reconnaissance (illustration ci-dessous avec un coin fumeur "sauvage" ordinaire). Le soin mutuel, la prévention sociale, le lien social, il faut s'en occuper et organiser la reconnaissance de qui s'en préoccupe, sinon, ce sont, par exemple, les petits dealers qui occupent le terrain. Rien à voir là non plus avec les bons sentiments.

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    Coin fumeur collectif ordinaire: illustration, façon Haïku visuel, à peine caricaturale, de la société du temps choisi (bisounours) pour les activités relevant du soin mutuel ou de toute autre activité sociale à caractère collectif.

       

     

     

    L'économie sociale et solidaire (ESS) est bien perçue comme projet de société selon le sondage récent effectué par Nord-Social.info

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  • Le contrat de travail mixte productif/social comme fondement d'un état providence participatif ou de mutualisation du travail social.

    Publié aussi chez Jorion, sous le même titre, suivi de nombreux commentaires.

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