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Analyse de l'échec du thème de la société de soin mutuel

Vous vous souvenez, c'était début 2010, Martine Aubry lançait le thème de la société de soin mutuel. Compte de tenu des réactions très mitigées de la société, on peut rappeler celle de Jacques Julliard (Bisounours et gnia gnia gnia) ou celle de Jacques Attali opposant le soin mutel au respect, ce thème est passé par pertes et profits. Et pourtant c'était une tentative très opportune de développement participatif de l'activité sociale rompant avec le mirage de l'état providence tout puissant. Pourquoi ce thème a t-il fait un tel flop?

Je vois trois raisons majeures:

  1. -Il s'agit de rompre avec la tradition de notre état social centralisé (Etat Providence) fondé par le sacro-saint CNR (Conseil National de la Résistance) en 1944 et qui a alors actualisé notre contrat social. Toute atteinte à ce système est vécu par la gauche (les gestionnaires des caisses paritaires, qui se vivent comme les gardiens du temple, en particulier) comme une atteinte à l'état social lui-même, alors qu'il s'agit de l'actualiser à nouveau et de l'enraciner populairement.
  2. -Le thème du soin mutuel renvoie à une quasi-Forme de charité propre au centre-droit, à la démocratie chrétienne à laquelle la gauche ne peut s'identifier. Un détour sur la question clé de la gratuité me semble indispensable pour associer l'ensemble des forces solidaires qui peuvent se retrouver dans ce projet de société de soin mutuel.
  3. -En France, on a plus de goût pour les grandes idées et pour chercher le sucre dans le lait chaud que pour les projets terre à terre. Cette question du soin mutuel apparaît donc comme un sujet politique mineur.

Si cette analyse est juste, il devient alors possible d'imaginer des stratégies permettant de surmonter ces obstacles à cette société de soin mutuel que j'appelle de mes voeux. Je l'appelle de mes voeux parce que la structuration de l'activité sociale, sous la forme d'une mutualisation du travail social, me semble être une des pistes importantes de résolution de l'exclusion qui caractérise notre organisation sociale et que la structuration de l'activité sociale peut à la fois réduire l'isolement et le chômage (Chômage + Isolement  ≡ Exclusion).

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Commentaires

  • non je ne crois pas que la gauche se hérisse à tout ce qui "porte atteinte à ce système (CNR)"...
    c'est le rapport entre "l'esprit de l'ordre" et "l'ordre en lui-même"
    tout ce qui porte atteinte à la formulation en elle-même, à la méthode ou aux moyens peut éventuellement représenter une évolution positive
    pas ce qui porte atteinte à l'esprit du contrat social...

    on peut choisir ensemble les "mises à jours" du "système d'exploitation" ^_^

    pourquoi "chômage+isolement= exclusion"? oui, posons-nous la question...
    est-ce une situation acceptable...
    car au fond, le travail, c'est quoi (et on passe le couplet sur l'étymologie du vocable... qui en dit long)?
    il s'agit de louer son potentiel d'activité à un tiers... location qui doit laisser l'essentiel du potentiel d'activité pour la production personnelle de ce qui nous est nécessaire chacun à sa mesure... location qui permet une rétribution pour accéder à tout ce qu'on ne pourra produire soi-même...
    or, dès lors que ce potentiel d'activité loué à un tiers additionné aux déplacements nécessaires dépasse les 3/4 de notre temps de veille ... on voit bien qu'on perd de l'autonomie. Ce système ne peut fonctionner que si, effectivement, la rétribution permet l'accès à ce qui est pour la population globale (à savoir parfois un salaire pour 2 adultes et 2 enfants) nécessaire et suffisant. Ce n'est pas le cas. L'on ne s'étonnera pas que certains pays fassent travailler leurs enfants: une bouche/un salaire...
    Nous n'échapperons pas à la réflexion sur le revenu universel d'existence, qui permet le partage du temps de travail productif ce qui arrange à la fois le fonctionnement capitaliste de l'entreprise, et le respect du vivant qui ne peut profitablement continuer à se voir appliquer les règles structurelles et productives usuellement appliquées aux choses mortes et aux concepts.

    tu parles de "structuration de l'activité sociale"... on voit déjà la manne de l'altruisme et de la solidarité familiale rendus à l'état de potentiel exploitable au titre de l'entreprenariat, et on imagine les emplois croisés dans une même rue, l'essentiel étant de justifier d'une activité contre un salaire... sur lequel prélever des impôts et autres taxes et charges... youpi!! Mme C nettoiera les fesses de son voisin Mr G et la femme de Mr G fera les soins infirmiers de la mère de Mme C... ainsi Mme C et Mme G auront un salaire... c'est important "un salaire"... pourquoi chacune ne s'occuperait pas tranquillement de son proche parent? mais parce qu'il faut manger ma ptite dame... mais qui paie qui? ...
    Déjà qu'on paie l'eau que l'on tire à la source... bientôt l'air qu'on respire...
    payer pour légitimer d'abuser de la consommation et de la pollution (payer donne tous les droits)
    payer pour qu'on s'occupe d'un tiers (proche parent), comme ça pas besoin de s'émouvoir, d'aimer, de consacrer du temps... rationalisons rationalisons...

    oui les questions sont plus profondes que "simplement" proposer des réformes chiffrées et des solutions "dans le cadre" indiscutable d'un capitalisme "naturel"...
    nan, je ne cautionne pas.
    la question du "soin mutuel" est essentiel,
    breveter le vivant est arrogant,
    imposer des règles productivistes et consommatrices au vivant (santé, éducation...) est accablant...
    faisons naître les "nouveau songes heureux" comme dit P. Rabhi (ci-contre) :o)

    merci de m'avoir dirigée sur ce lien
    belle semaine à toi

  • Beaucoup de points dans ton commentaire foisonnant. Mais globalement, je crois qu'on est assez en accord sur le fond, c'est à dire sur notre conception de contrat social.

    Pour ce qui est des crispations de la gauche, autour du CNR ou l'emploi, je crois que ces crispations sont bien réelles et qu'elles tiennent dans une conception, un mythe d'état providence tout-puissant qui pouvait fonctionner pendant les années de reconstruction après-guerre. Mais il ne faut pas négliger les places qui sont en jeu dans cette crispation. Beaucoup d'acteurs du social dans le cadre actuel verraient leur situation, leur place évoluer dans une conception subsidiariste de l'état social comme celle que je propose qui s'apparente au care pour l'essentiel. Dans un premier temps, tous ces acteurs se voient menacés par de tels projets.

    Pour ce qui est du revenu d'existence, je ne suis pas un farouche partisan de cette formule, parce qu'on touche de beaucoup trop près à des ressorts vitaux. Je suis beaucoup plus proche du revenu garanti de Jean Zin qui combine de façon indissociable revenu garanti, monnaie locale et coopérative municipale dans une optique d'autonomisation et pas dans une optique utilitariste court terme. Il est important de mettre en perspective qu'un pouvoir public n'est pas un ménage (c'est ce que nous suggère le murmure permanent sur la dette en ce moment), qu'un de ses rôle, une de ses responsabilités est de faciliter l'accès à l'activité pour tous ou au moins le plus grand nombre et pas de générer des seuils d'employabilité excluant. La monnaie est un des outils à sa disposition pour faciliter les échanges, si elle devient un frein c'est qu'il y a un os quelque part.

    Pour les autres points touchant à la structuration de l'activité sociale, je te renvoie à la page sur l'état providence: http://solidariteliberale.hautetfort.com/societe-du-soin-mutuel.html qui détaille un peu plus l'approche que je propose et comment elle s'inscrit dans notre histoire, dans le mouvement d'émancipation féminine, d'ouverture des frontières et d'évolution démographique.

    Bonne journée à toi et merci de ta visite.

  • èh, oui foisonnant et pas toujours très structurés...sont mes coms...^_^
    pardon.

    - concernant le terme "crispation de la gauche" ce n'est pas la crispation qui est niée, mais l'attribution globale à LA gauche. Car La gauche n'est pas une et indivisible, loin s'en faut...chacun de ses "membres" a sa propre perspective, il est heureux que nous puissions, quelles que soient les mouvances, avoir les uns et les autres du recul sur certains points...

    - concernant le revenu universel d'existence, je l'évoquais ici en tant que réflexion impérieuse, et non en tant que modèle précis. Les aménagements doivent être ciblés en incluant ce principe, certes, mais cela ne peut suffire, évidemment. Toute la structure même est à réfléchir, je vais de ce pas me promener sur certains de tes liens de projets de sociétés qui me sont encore flous, afin de ne plus surcharger en commentaire. :)

    - concernant la monnaie, oui, ya un os! doux euphémisme.

    je file sur le lien proposé
    merci
    et très bonne soirée à toi

  • Concernant les crispations, d'accord avec ta remarque, mais pour le moment, c'est la crispation qui l'emporte. Les crispations idéologiques constituent une question politique de fond. On a à faire face à des défis considérables, écologiques, sociaux (découplage du travail et du temps), religieux (tensions très fortes comme le révèle le déplorable épisode de cette vidéo qu'aucune personne responsable ne devrait avoir relayée), ressources/géopolitiques (ce n'est pas un problème écologique, mais une question de matières premières, donc plutôt industriel), démographique... Or avec les vieux outils philosophiques particulièrement portés sur la morale et ne nous donnant que peu de prise sur les idéologies, on n'a aucune chance d'échapper au pire. Il y a quelques tentatives de rompre avec cette misère de la philosophie (expression de Marx). Jean Zin développe une philosophie de l'information (pas les infos de la radio!). Bruno Latour tente de remettre nos représentations à leur place (à l'image du célèbre tableau de Magritte "ceci n'est pas une pipe"). On trouve des précurseurs (Michel Foucault avec son "Courage de la vérité", mais ça reste incantatoire chez lui).
    Par contre, l'expérience pratique la plus avancée pour mettre l'information (la prise en compte des réalités) au-dessus des histoires qu'on se raconte, c'est celle de la sociocratie d'Endenburg. J'ai fait un article là-dessus courant 2011. De mon point de vue, c'est de très loin l'expérience collective qui va le plus loin pour sortir des bonnes intentions qui nous mènent en enfer, pour dégonfler les problèmes d'égo et de délire idéologique (crispations) qui nous sont si communs. Sans cette organisation du statut de l'objection et de l'objecteur qu'il faut protéger, le parti-pris a de beaux jours devant lui et ce n'est pas de cette façon que nous pourrons résoudre les problèmes immenses auxquels nous devons faire face. Le risque que nous les résolvions une fois de plus par le chaos et les guerres me semble très élevé.

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