La société du soin mutuel pour occuper le terrain, faire de la prévention et contre la société de l'agression mutuelle et de la punition, une révolution conceptuelle qui n'a rien à voir avec les bons sentiments.
Après les 30 glorieuses de Jean Fourastié, pendant que l'économie poursuit son chemin tourmenté, peut-être dans l'attente de la révolution conceptuelle dont un point d'orgue serait « l'interdiction des paris sur les variations des prix » prônée par Paul Jorion, le Parti Socialiste présente son projet de « société du soin mutuel » sans faire beaucoup de bruit jusqu'ici. Et pourtant, ce n'est pas tous les jours que nous assistons à une révolution conceptuelle majeure en politique (Cf par exemple l'interview de Sandra Laugier et Pascale Molinier dans Raison-Publique). Quand Lionel Jospin, alors premier ministre, avait dit à juste titre « l'Etat ne peut pas tout » au sujet de son impuissance à empêcher la fermeture d'une usine, il avait subit les foudres de ses supporters habituels. « L'Etat Providence ne peut pas tout » pourrait servir d'introduction à la nécessité de la société du soin mutuel. Pour l'essentiel, il s'agit de faire en sorte que chacun y trouve son compte à prendre part au travail social dont toute société à besoin et ne plus seulement s'en remettre aux femmes ou à l'Etat Providence.
Quand l'Etat Providence a été mis en place au sortir de la guerre, les familles étaient nombreuses et les femmes étaient en majorité au foyer. On a pu croire pendant un temps qu'il suffisait de ponctionner une part des richesses créées par le domaine productif et de la redistribuer au domaine social pour que la solidarité soit efficace et que nous fassions ainsi société. Petit à petit, les familles sont devenues moins nombreuses et les femmes ont quitté le foyer pour le marché du travail. Avec le vieillissement de la population, cette mutation a rendu de plus en plus inefficace et coûteux le principe de l'Etat Providence. Les 35h, qui sont une tentative de mise en forme du projet utopique et creux de « Société du temps choisi » ou « Société du temps libre »*, n'ont rien changé à cette situation de jachère sociale, qui plus est en fragilisant le socle économique de l'Etat Providence, parce que les heures dégagées par les 35h n'ont pas été réinvesties dans le domaine social et que les femmes continuent de porter l'essentiel de ce travail social en plus de leur travail rémunéré.
Martine Aubry est bien placée pour savoir que les 35h n'ont pas eu beaucoup d'efficacité sociale. Est-ce que sous sa direction le parti socialiste va enfin pouvoir sortir de l'impasse de l'Etat Providence pour emprunter celui de la société du soin mutuel sans renoncer à l'essentiel de l'Etat Providence? Il est certain que cette révolution conceptuelle peut lui redonner une bonne longueur d'avance sur la droite qui s'enferre dans sa vision mortifère de « société de l'agression mutuelle ».
On peut rendre hommage au musicien François NICOLAS qui, avec une philosophie très proche de celle de la société de soin mutuel, a repris la rue aux dealers de son quartier en un an en créant un collectif anti-crack. Sans prétendre se substituer aux pouvoirs publics, sans se comporter comme une milice, il a occupé le terrain, avec un groupe de pères soucieux du devenir de leur progéniture, et a ainsi réussi à se réapproprier la rue. Le fait qu'il se soit ainsi heurté à la drogue n'est pas anodin. La prise de pouvoir des dealers sur la rue n'est qu'une concrétisation aigüe du vide social que l'Etat Providence n'a pas pu combler. Sans une participation massive, populaire à la vie sociale, le nihilisme, dont la drogue constitue une des manifestations, occupe le terrain vacant.
Depuis les années 90, je tente de développer un modèle social de la même famille que celui de la société du soin mutuel, d'abord sous le nom de solidarité libérale, puis sous celui d'Etat Providence Participatif et je ne vais donc pas bouder mon plaisir, d'autant que cette dénomination de société de soin mutuel me semble plus réussie. Ce concept de société du soin mutuel rompt à la fois avec l'utopie de l'Etat tout puissant et avec celle de la société du temps choisi. L'Etat ne peut pas tout, l'Etat Providence non plus, mais la société du soin mutuel peut nous venir en aide, ainsi que l'a démontré François NICOLAS pour la drogue.
François NICOLAS nous donne une définition de la société de soin mutuel avec sa vision de la prévention: « La prévention n'est pas affaire véritable des pouvoirs publics mais affaire de tout le monde, de tout un chacun, d'un père ou d'une mère, d'un frère ou d'une sœur, d'un ami ou d'un copain, d'un éducateur ou d'une fiancée, de tel groupe sportif ou de tel collectif musical, etc. La prévention est affaire de la société, nullement de l'état, lequel chaque fois qu'il se mêle de prévention en matière de drogues - et il le fait beaucoup trop aujourd'hui - le fait très mal : en « instruisant » des différences entre cannabis et héroïne, en en appelant à la peur du gendarme et aux risques encourus (là où le jeune est précisément en quête bien compréhensible de nouveaux risques à affronter) alors que toute prévention véritable de la drogue doit surtout montrer qu'il y a pour un jeune aujourd'hui en France beaucoup plus intéressant à faire qu'à se droguer, qu'il n'est pas condamné à ne rien vouloir ».
Le projet de société du soin mutuel n'a pas grand chose à voir avec les bons sentiments ainsi que le qualifient certains opposants à ce projet qui tentent ainsi de le dénaturer et de le dévaloriser. Ce qui est en jeu concerne la prise en charge sociale autrement que par délégation. La crise financière que nous traversons occulte en grande partie la crise de modèle socio-économique qui s'approfondit. Cette crise socio-économique est pointée par de nombreux analystes. Elle provient du fait que nous devons en même temps réduire le chômage, c'est à dire redistribuer l'activité, dans une optique de développement durable et non plus dans une optique de croissance infinie. La mise en place d'un projet de société du soin mutuel est capable de résoudre cette équation en opérant un transfert d'activité vers les besoins sociaux sans pour autant grever encore plus le budget de l'Etat. Nous attendons à tort que l'état s'occupe du soin social et de la prévention alors que c'est l'affaire de tous. C'est un peu comme si on attendait que l'arbitre fasse aussi le jeu dans une rencontre sportive. C'est là qu'est l'enjeu de la société de soin mutuel et non dans une question de bons sentiments. Un des autres gros enjeux de la société de soin mutuel, c'est qu'elle offre une occasion de réduire fortement la "domination masculine" ou les inégalités liées au sexe grâce à la redistribution d'activité.
*"La société du temps choisi", dont André Gorz était une fervent défenseur, était une tentative de résolution de l'équation de redistribution de l'activité dans une perspective durable, redistribution inéluctable compte tenu des énormes gains de productivité que tous les secteurs ont connu et qui induisent des mutations considérables de la main d'oeuvre (par exemple le dernier exode rural en France, entre 1945 et 1975, le pourcentage d'agriculteurs est passé de plus de 1/3 à moins de 4% des actifs). C'était sans compter sur le fait que presque personne ne ramassera un papier gras ou un mégot spontanément s'il n'est pas soutenu par un quelconque cadre juridique, par une quelconque reconnaissance. C'est celui qui jette ses papiers gras ou ses mégots n'importe où qui donne le la, qui impose sa norme, sans une organisation efficiente de la reconnaissance (illustration ci-dessous avec un coin fumeur "sauvage" ordinaire). Le soin mutuel, la prévention sociale, le lien social, il faut s'en occuper et organiser la reconnaissance de qui s'en préoccupe, sinon, ce sont, par exemple, les petits dealers qui occupent le terrain. Rien à voir là non plus avec les bons sentiments.
Coin fumeur collectif ordinaire: illustration, façon Haïku visuel, à peine caricaturale, de la société du temps choisi (bisounours) pour les activités relevant du soin mutuel ou de toute autre activité sociale à caractère collectif.
L'économie sociale et solidaire (ESS) est bien perçue comme projet de société selon le sondage récent effectué par Nord-Social.info
Commentaires
Je ne vois aucun rapport entre ton concept de soin mutuel et le projet de programme du PS. Quant aux 35h, c'est simplement un abandon, l'idée qu'on ne pourra pas créer d'emploi, et qu'il faut donc gérer la pénurie. Idée partagée par toute la classe politique française, la politique de pré-retraite ayant la même origine.
La solidarité que tu prônes ne peut pas venir de l'Etat. C'est de la vraie solidarité, des gens qui se prennent en main. Du libéralisme, terme que tu emploies à bon escient, avec l'expression solidarité libérale. Mais, un programme politique, de nos jours, c'est un concours de populisme, et de promesses.
Et les gens y sont assez habitués. Ils attendent beaucoup de l'Etat.
D'autre part, l'idée que l'Etat fédère les bonnes volontés est intéressante. Mais une organisation devient vite un enjeu de pouvoirs, de tensions. Et les potentats locaux, les élus locaux, veulent souvent se servir de ce genre d'association. C'est une véritable révolution dans la manière de faire de la politique que tu souhaites. Tu es encore plus utopiste que moi, qui souhaite plus simplement mieux organiser cet état-providence.
Cependant, c'est vrai, le fait que le social nous viennent de l'Etat nous a fait perdre de vue qu'il était financé par notre travail, et que, finalement, il venait de nous. Nous nous en remettons aux politiques, alors que nous pourrions participer à l'organisation du social.
Pour cela, il faudrait des initiatives. Personnellement, même si j'ai des idées, je n'ai pas le courage d'essayer. Je manque déjà de temps pour développer des projets personnels, essayer de changer d'orientation professionnelle. Vaste programme.
Sinon je réfléchis à l'organisation du système social: éducation, formation, santé, et logement (ou conditions de vie, plus globalement). Des sujets bien galvaudés, que j'essaie d'aborder avec sérieux. Car, là aussi, que faire pour améliorer les choses? Le débat est pauvre. Dans l'éducation, par exemple. Du moins le débat médiatisés. or, c'est ce qui compte, en démocratie.
Donc, concrètement, on peut éventuellement agir sur deux axes. Agir concrètement, comme I² et ses crèches. Etablir des principes d'un bon système social. Principes qui pourraient être mis en pratique par l'Etat, où des associations.
Bien Michel : Pourquoi pas, après tout ?
Soit on "monétise" le social comme depuis les années 45, soit on "démonétise" au moins partiellement, au moins à la marge, ce qui libère les "initiatives-terrains" avec plus ou moins de succès, la puissance publique (qui nous appartient à tous, redevenant après coup l'ultime ressort.
J'aime bien ta proposition.
Mais qui se heurte effectivement aux critiques de Vladimir.
Car, et je le constate même pour mes petites crèches, c'est un enjeu de pouvoir pour tous les élus.
(Chez moi, ils sont près à tuer ce qui existe et fonctionne, rien que pour le plaisir de dire que je suis un "méchant" ignoble sur lequel on ne peut pas compter, quitte à "municipaliser" par derrière pour se faire "mousser" et dire Ô combien que l'équipe d'édiles locales prend ses responsabilités envers les populations d'électeurs : Faut le faire, mais ils le font quand même ! Même si on sait que ça coûtera 3 fois plus cher à l'impôt local...)
Un jour ou l'autre, faudra en passer par un strict, très strict non-cumul des mandats... dans la durée : Jamais plus de deux mandats dans une vie d'homme politique, quel que soit le mandat.
En revanche Vladimir, je ne suis pas d'accord : on peut tout aussi bien faire dans tous les domaines sociaaux, y compris l'éducation.
Je participe bien à former des élites fiscales à raison de 45 heures/an et 1.000 €/an : une misère !
Personne ne peut en vivre et pourtant, je suis parfois invité (à titre gratuit, là) à "sapiter" un prof d'histoire dans les quartiers pour expliquer les institutions du pays à des gamins qui ne savaient même pas que ça existe (le prof ne sachyant pas trop à quoi ça sert non plus, puisque c'est le premier à aller vouloir "dégommer" son ministre de tutelle...)
Bref, soit on se prend en main, soit on se fait materner par nos élus.
Dans un cas, on paye en temps (et du coup ça réduit les revenus imposables et c'est un des mécanismes d'optimisation sociale et fiscale que j'adore : des tranches marginales d'IR à des cotisations en tranche C dont je ne reverrai jamais la couleur, je suis passé en non imposable et restitution de PPE à plein pot avec un forfait social que je ne paye même pas tous les ans, c'est dire ! Mais je compense par l'accroissement de mon patrimoine qui me refilera des rentes plus tard au point que j'entre dans l'ISF et applique sans vergogne le plafonnement et bénéficierai même du bouclier si par hasard ça "dépasse mes bornes").
Dans l'autre, on paye et on délègue à la puissance publique.
C'est le schéma qui prévaut aujourd'hui.
Mais ce schéma coure à sa faillite depuis trois décennies...
Les solutions de Michel se projettent donc au-delà de l'horizon immédiat et court-termistes, pour aller chercher des alternatives.
Et les siennes ne sont pas si mauvaises que ça.
Mais faut trouver "le fil rouge" qui convaincra tout le monde ou au moins une large majorité pour les mettre en place.
Je suis confiant, il y arrivera...
Vladimir et I2,
Est-ce que vous connaissiez le collectif anti-crack de François Nicolas? C'est pas tout rose, mais ça vaut vraiment le coup de s'y attarder. Par contre, il n'est pas conscient de sa formidable qualité et de sa capacité d'entrainement, et de mon point de vue, c'est ce qui lui a fait sous-estimer le besoin de normalisation et de ritualisation de ce genre de démarche pour qu'elle puisse faire école. On va bien voir ce que devient l'annonce du PS dans les mois à venir, simple slogan ou véritable révolution conceptuelle chez les soces?
Personnellement, j'ignorais.
Je suis à 1.000 lieues des problèmes de drogue : complètement béotien sur le sujet depuis le lycée où j'ai vu mourir un de mes potes d'alors d'over-dose, alors même que tout le monde ignorait qu'il se shootait !
J'aurai tendance à sortir le fusil dès que je vois de la "farine"...
Ce que j'ai négligeament fait un jour chez un type qui avait deux lignes sur son bureau : j'ai réellement cru que c'était de la poussière que j'ai balayé d'un revers de main sur la moquette.
Ca eut pas plu !
Et je n'ai pas pu faire affaire avec ce client-là...
Je ne connais pas ce collectif. Effectivement, si son initiateur peut entraîner d'autres personnes, ce serait un progrès. Mais, si ça ne se fait pas, c'est peut-être aussi à cause d'obstacles politiques. Je vais regarder le lien.
Oui, Michel, sauf que l'initiative de François Nicolas a fait long feu depuis 2007... Les dealers sont revenus, ils officient juste un peu plus haut en suivant le canal St Martin...
C'est bien pour leur quartier, mais, ça ne fait que déplacer les problèmes.
Sans être un "opposant" à ce que tu proposes, je ne comprends toujours pas comment on pourrait "institutionnaliser " la démarche... en donnant du temps libre aux salariés et en la rendant "obligatoire" ? Tu sais bien que les gens qui choisissent d'être utiles sur leur temps libre sont une infime minorité... même rémunérés avec des bons sociaux, ils préfèreront passer leur temps devant la télé et autres "loisirs"...
S'il y a un domaine sur lequel je pense que le politique atteint ses limites, c'est sur l'éveil des consciences... Il faudrait plusieurs générations éduquées à l'école pour que ça fonctionne et qui est prêt à mettre ça dans un programme scolaire ?
Je ne sais pas s'il y a encore de l'éducation civique dans les écoles, moi, je me souviens encore de ce que j'y ai appris ; il faudrait y rajouter l'éducation sociale, mais on rentrerait immédiatement dans des conflits d'intérêts politiques et on serait fatalement accusé de vouloir soviétiser la société...
Personnellement, je n'ai jamais attendu de l'État quoi que ce soit pour avoir une activité sociale en me constituant un village autour de moi. Je connais tous mes voisins et nous partageons beaucoup de convivialité de façon tout à fait naturelle. C'est un état d'esprit et je continue à douter que ça puisse s'imposer du haut...
Toto,
François Nicolas est très conscient que le problème a été déplacé et il a par ailleurs entrepris une démarche plus profonde de compréhension. Par contre, je crois qu'il n'a pas saisi le caractère un peu exceptionnel de sa capacité d'initiative et d'entrainement. Si ses tournées s'étaient soldées par quelques jours de congés supplémentaires pour les participants, cette action d'occupation de la rue par les pères, au lieu de l'abandon ordinaire, aurait pu avoir une chance de se péréniser. Avec le coin fumeur, c'est justement ça que je veux illustrer, comment ça se passe de façon ordinaire. C'est vraiment pour cette raison qu'il est très important, non pas de l'imposer d'en haut, mais de l'accompagner d'en haut. L'incitation peut être assez simple pour l'essentiel: soit tu cotises, soit tu participes directement, ou tu peux gagner des jours de congés si ton activité sociale est en dehors des heures travaillées usuelles comme pour le collectif anti-crack.
Voilà, je crois que je viens de comprendre ce qui me gêne dans tes propositions, à travers tes deux dernières phrases...
Finalement, quelle différence entre payer des professionnels et inciter les gens à avoir une activité sociale utile en leur "donnant" (c'est à dire en fait en les payant) du temps libre, du surplus de cotisations et autres gratifications ??? C'est toujours du donnant/donnant... C'est toujours un rapport "marchand" et finalement tu ne résous pas le problème de fond qui est l'individualisme et le chacun-pour-soi de cette société.
Au final, c'est l'exact opposé de ce que fait Infree, avec son activité bénévole, dans sa crèche ou de ce que je peux faire en organisant des repas de quartier qui resserrent nos liens sociaux...
Tu n'éveilles pas les consciences avec ton système, tu "marchandises" (le terme est fort, mais c'est exprès) et tu institutionnalises le dernier espace libre de nos initiatives privées... et quelle différence également avec toutes les associations sociales qui se font subventionner ? Aucune, à part que ton système s'individualise, c'est tout..
Toto, je suis d'accord avec tes conclusions. Le domaine social a besoin qu'on s'en occupe et de façon efficace. On y perd un peu en spontanéité, en fraicheur, en éveil, on affadit comme le dit François NICOLAS. Ma proposition ne t'empèche aucune initiative spontanée et gratuite comme tu le fais et comme le fais Infree, mais on ne peut compter là-dessus pour couvrir les besoins.
D'un autre côté, si je regardes comment je mène mon travail rémunéré, il y a longtemps que j'ai décidé que ce n'était pas parce que j'étais payé pour le faire que je devais seulement me vendre. J'y mets plus que je ne suis obligé sans en attendre la moindre reconnaissance, c'est que j'y passe beaucoup de temps, alors tant qu'à faire.
Mais, c'est là où je ne te suis pas... ta proposition, même généralisée, ne couvrirait pas les besoins !!! Elle ne fait que déplacer des forces productives sur du social et ce qui ne sera plus produit par ces gens sur leur temps social, il faudra bien le trouver ailleurs... On affaiblit l'économique, pourquoi au fait ? Parce que nos dirigeants sont incapables de comprendre le monde globalisé ? Parce que les priorités sont de renflouer les banques et pas de loger les SDF ?...
Bref,je suis désolé de te dire que ton système de vases communicants ne crée rien... pas même un nouveau comportement social, puisque on "marchandise" même l'initiative sociale actuellement bénévole et spontanée.
Toto,
Je ne peux pas te démontrer plus. Si je suis d'accord avec l'ensemble de tes propositions sur le plan économique qui nous apporteraient très probablement une bien meilleure efficacité économique.
Ensuite, comment on gère le travail social, extension de l'état providence? Bénévolat? Branche de l'activité économique? Etat Providence Participatif?
Si on rationalise un peu les structures actuelles (voir : http://solutions-politiques.over-blog.com/article-3989222.html) et ça c'est le devoir de l'Etat, on n'est pas obligé de choisir et plusieurs formes d'intervention peuvent coexister.
Si tu ne peux pas me démontrer plus... est-ce que tu remets en cause, pour autant, ta croyance en l'efficacité et la pertinence de tes propositions ?
Non, Toto, ce que je ne réussis pas à cerner, c'est pourquoi je ne réussis pas à te convaincre. Je vois très clairement que la solution que je propose serait efficace et je t'avais contacté pour que tu me donnes un coup de main pour essayer de chiffrer de façon un peu plus précise. Je n'ai pas pour objectif d'éradiquer l'Etat Providence, mais de le compléter. Je crois même que ma proposition serait stimulante pour les autres formes de participation à la vie collective.
Bé, il n'y a pas de problème pour que ta proposition co-existe avec d'autres... Mais, ce qui m'étonne, c'est que tu continues à en parler comme d'une solution quasi "révolutionnaire", alors qu'il y a tellement de contre-arguments qu'en aucun cas elle ne peut être ni une priorité, ni la panacée pour résoudre les problèmes sociaux...
Pour une raison simple, ton système de vases communicants ne crée rien de plus que ce qui existe déjà actuellement, pire, il complexifie un système qui est déjà au bord du gouffre à cause des métas structures qui se sont empilées.
Enfin, je te rappelle que si tu veux partager ton temps productif avec un temps social, c'est déjà un choix que tu peux faire... Pas facilement, il est vrai, mais c'est aussi une question de volonté personnelle. Sauf que ce que tu veux toi, c'est que ce soit institutionnalisé, comme peuvent l'être les congés formations ou pour création d'entreprise ou autres, ... pourquoi pas, mais je ne pense pas que des seuils significatifs seraient atteints, même avec cette possibilité donnée aux salariés...
Une petite étude d'opinion serait intéressante ; genre, une vingtaine de questions qui exploreraient les motivations sociales de la population pour savoir dans quel cadre et à quelles conditions, ils seraient prêts à prendre cette option de partage de leur temps de production... Je crois que tu serais bien déçu par les résultats...
Toto, Oui, je vois cette proposition comme révolutionnaire parce qu'elle propose de passer de l'Etat Providence, c'est à dire de la délégation à une participation directe aux tâches sociales (cf le très bon livre de Denis Clerc "La France des travailleurs pauvres" qui fait le bilan actuel de cette délégation associée à la tentative de marchandisation avec CESU actuelle qui est une impasse). De mon point de vue, il y a surtout des arguments positifs (prise en charge sociale correcte sur le plan économique mais surtout sur le plan collectif, rédistribution d'activité, action sur tous les facteurs d'exclusion -cf "La lutte des places" qui me semble être un des meilleurs ambassadeurs de mes propositions) et bien peu de contre-arguments (quelques difficultés d'agenda mais qui peuvent se résoudre). Une fois qu'on est passé de l'autre côté du guichet, l'engagement modifie complètement la perception et l'opinion qu'on a de la boutique, les plus acharnés opposants peuvent devenir les plus ardents défenseurs. C'est une des raisons pour lesquelles je suis d'accord avec toi qu'un sondage ne donnerait sans doute pas des résultats très encourageants aujourd'hui. La questions des seuils significatifs est en effet primordiale et c'est une des raisons pour lesquelles l'institutionnalisation me paraît indispensable. Si la mise en place et faite en dépit du bon sens, si l'avantage, la gratification à basculer une part de son temps dans le social n'est pas suffisant, alors le seuil ne sera pas atteint.
Tu sais, je voudrais être comme toi, un peu plus optimiste sur la capacité des humains à modifier leur attitude individualiste ; mais le contexte social dit tout l'inverse, au point que quand tu regardes ce qui se passe, il y a vraiment de quoi désespérer...
Il y a quelques jours, il y a eu une manif Porte de Montreuil, des commerçants et riverains, contre "l'envahissement" du marché et de ses abords, par tous les misérables qui viennent y vendre tout et n'importe quoi pour survivre... Tu te rends compte de ce que ça veut dire ???!!! C'est monstrueux... Les gens pourraient manifester pour que les politiques tiennent leurs promesses, donnent du boulot, logent les SDF, ... non, ils manifestent contre la misère envahissante...
Les syndicats vont faire semblant de lutter pour maintenir l'âge légal de départ à la retraite à 60 ans... et toujours personne, chez eux, pour poser le problème de la quantité de boulots disponible, alors que si on remettait au travail les 5 millions qui en sont exclus, nous n'aurions même pas à nous poser la question... Un non sens de plus... et il y a tellement de sujets où les gens se trompent d'ennemis et de droits à défendre, que je me demande si tout ce que toi, moi ou d'autres, pouvons imaginer pour changer les rapports sociaux et le déclin de notre économie ne sont pas de douces utopies... L'individualisme semble avoir définitivement gagné et tous nos projets resteront lettre morte...
C'est pas mon jour, pour trouver quelques signes qui pourraient me faire espérer..
Toto, ce que tu me dis est en parfaite harmonie avec le petit Haïku visuel du coin fumeur de cet article. Chacun pour soi et la merde pour tous en somme! Tu ne fais que renforcer ma démarche d'institutionnalisation et de gratification plutôt que compter sur l'initiative spontanée et la gratuité.
Je me suis fait la remarque que le vieillissement de la population s'accompagnait d'une montée de la peur induite par une perception de sa propre fragilité. Encore une raison d'organiser et de structurer le secteur social.
Tous nos projets resteront lettre morte? Pas sûr. Pour la première fois un parti politique de taille parle de société du soin mutuel. L'Allemagne interdit les positions à découvert. Sur le plan de la ténacité, tu peux t'inspirer de Jorion qui est aussi conscient que toi des difficultés. Ce n'est pas qu'il n'est pas critiquable, il le sait, mais il fait au mieux avec ce qu'il a et c'est déjà beaucoup.
C'est surtout une société faite par des vieux pour des vieux qu'on se prépare... et qui au fond est déjà en place... Une société conservatrice, peureuse, vivant sur ses acquis, incapable de se projeter dans l'avenir (et pour cause...), ...
Quel parti parle de société du soin mutuel ??? C'est pas le PS au moins ?
Bien sûr qu'il faut persévérer, mais franchement, je ne vois rien changer aux bons endroits... des ajustements à la marge, de la politique à la petite semaine, c'est tout ce qu'on voit.
VV: J'essaie d'envisager la possibilité de ton système. Il y a, selon moi, deux éléments dans ce que tu proposes. D'une part, l'utilisation des bonnes volontés et des initiatives non publiques.
Le souci étant de bien les utiliser.
MM: bien les utiliser ne correspond pas tout à fait à ma démarche. Ce que je propose vise à stimuler la participation, pas à la créer d'en haut. Pour moi, le rôle de l'état dans cette affaire est de règlementer à la fois pour poser les limites, mais aussi pour construire la reconnaissance, la gratification, ensuite d'arbitrer, pas de faire.
VV: Je prendrai l'exemple des politiques en faveur des jeunes de banlieues difficiles. Souvent, l'Etat finance des associations pour occuper le terrain. Sans grand résultat. Pourtant, j'ai lu que chaque préfecture pouvait nommer quelqu'un chargé de coordonner l'action dans ces quartiers. Je ne sais pas si cette possibilité existe encore. Mais l'idée de coordonner l'action associative et publique, en l'occurrence ici les écoles, est intéressante. Elle pourrait être appliquée à la sécurité.
MM: Je te renvoie à l'initiative de François Nicolas et à la réponse précédente, c'est assez différent de ce que tu suggères.
VV: Le deuxième élément de ton système, c'est le défraiement des bonnes volontés. Des jours de congés pour permettre à ceux qui le souhaitent de s'investir dans une action utile, reconnue utile plutôt, à la collectivité. C'est là que ça se complique. Ce serait à la charge de l'employeur. Et très inégalitaire en fonction des salaires.
MM: L'unité de compte est ici plutôt le temps que l'argent. Une journée de congé de l'un valant une journée de congés de l'autre. Il s'agit d'un transfert, soit tu participes au travail social, soit tu cotises. Dans le cadre des prélèvements actuels, c'est en effet au niveau des ponctions sur le travail que ce transfert se fait. Si on se place dans un cadre futuriste où les prélèvements seraient déplacés du travail à l'individu, le transfert serait à opérer sur les impôts directs sur les revenus (tous les revenus, bien entendu).
VV: Un crédit d'impôt pourrait-il compenser, versé soit à l'employeur, qui maintiendrait le salaire, ou au salarié, qui sacrifierait de son salaire pour son activité sociale? Compliqué, et difficile à contrôler pour éviter les abus. Ou autoriser l'association à utiliser les subventions pour rémunérer ses membres.
MM: Ce point est entièrement à inventer et il faut l'adresse et la connaissance de I2 et de Toto réunis pour ne pas en faire une usine à gaz, mais pour l'instant, ilssont trop flemmards pour s'y mettre (en fait ils n'y croient pas et objectent que ce serait inévitablement une usine à gaz!).
VV: Une question subsidiaire se pose. Le système que tu proposes ne se substituerait-il pas, en partie, aux fonctionnaires? Dans ce cas, il pourrait être rémunérer par les économies réalisées de ce côté. Mais est-ce que c'est ce que tu envisages.
MM: Il y aura un nouvel équilibre public/privé sur ce segment d'activité susceptible d'évoluer.
VV: Ta proposition, en tout cas, à le mérite d'impliquer les gens. Nous n'avons pas conscience de ce que nous bénéficions de la collectivité.
MM: oui, mais en plus, on adhère d'autant mieux à une activité qu'on y participe, c'est l'effet d'engagement créé par la participation (je ne suis pas certain d'être clair). Voilà, Vladimir, j'èspère avoir un peu clarifié ce projet.