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politique - Page 2

  • Socio-démocrate en errance

    En plus des préoccupations écologiques que toute démarche politique non suicidaire doit aujourd'hui intégrer (voir le PIBED par exemple ou le ministère de la bonne bouffe), ce que je demande au PS (c'est à dire aux socio-démocrates), c'est de construire un programme clairement socio-démocrate en accord avec le monde actuel (individus, frontières poreuses, forts moyens d'échanges). Les trois principaux points que je souhaite qu'il développe sont les suivants:

    • Empêcher les riches de plumer les pauvres et non pas prendre aux riches pour donner aux pauvres. Il s'agit en fait d'interdire les paris sur la variation des prix (spéculation), afin que l'économie se débarasse de l'énorme parasite qu'elle trimballe sur son dos. Je dois à Paul Jorion cette requête et aussi d'avoir très clairement établi la différence entre le libre échange et le parasitisme économique de la spéculation court-terme qui s'abrite derrière l'alibi du libre échange. Permettons au libre-échange d'exister, là ou la concurrence peut être effective, en interdisant les paris sur la variation des prix afin d'évaluer des éventuelles corrections à lui appliquer.
    • Promouvoir un régime de retraite par répartition unique basé sur des comptes individuels. C'est le système défendu par Bozio et Piketti dans un petit fascicule du CEPREMAP.
    • Opérer un déplacement fiscal massif de l'entreprise vers l'individu afin de se mettre en accord avec la réalité de la société individuelle dont notre révolution était porteuse et qui est devenue une réalité. Il s'agit d'arrêter d'être anti-entreprise (donc pourquoi les pénaliser dans un contexte de mondialisation des échanges) sous prétexte de défendre l'employé et il s'agit de donner toute sa chance à l'initiative. L'impôt se déclinerait en indirect avec une TVA (y compris sociale) , et direct avec l'impôt sur les revenus (tous les revenus, y compris ceux provenant du capital) très progressif, des taxes foncières et des impôts locaux. Le système actuel comporte tellement d'exceptions (les niches) qu'il est temps d'en changer.

    En ce qui concerne l'état providence, je milite ici pour qu'il devienne participatif, mais je ne crois pas que les esprits soient encore tout à fait mûrs pour que ce projet puisse être accueilli favorablement et nous pousserons certainement l'expérience désastreuse en cours de marchandisation  de l'aide à la personne avant de se pencher sur ce projet (ou pour être plus précis que "marchandisation" et être fidèle à la catégorisation développée dans ce blog, de son développement "productiviste"). Je note toutefois une progression, très modeste, de l'utilisation de l'expression "Etat Providence Participatif" sur le net (ICEA; santé pour tous; auteur inconnu; dossier canadien 2003 qui antériorise l'expression; AIMF 2006; dossier UNESCO de PF)

    Faut-il acquérir une connaissance de l'acteur-réseau comme le suggère Y. Rumpala? On peut parier que bon nombre de ceux qui dominent aujourd'hui pratiquent déjà.

  • L'équité, équilibre du jenous plutôt que l'onanisme social.

    Selon Georges Dumézil, le monde Indo-Européen dont nous sommes issus est organisé autour de 3 pôles ou plutôt 3 fonctionnalités. Cette grille me semble toujours pertinente, quand bien même elle a perdu de sa limpidité à cause de l'effondrement religieux, du développement des médias et du pouvoir que procure la richesse:

    1. Le pôle de l'ordre, (sacré, religion et souveraineté, finalité, politique) c'est à dire le pôle qui contient le sens de la société. En général, pour ne pas dire toujours, ce pôle prend appui sur une mystique, un système divin extra-humain, ce qui lui confère une grande force. Un ordre suppose que la société qu'il ordonne soit composée d'une majorité de croyants dans cet ordre, l'ordre s'édifie et s'enracine dans la foi. Toutefois, un ordre peut perdurer bien après que la foi ait disparu, car il agit comme le ciment d'un édifice commun. Le remettre en question génère une peur. L'individu a peur d'être exclu du groupe. La peur de l'exclusion du groupe est le ciment de la décadence d'un ordre qui a vécu, jusqu'à ce qu'un nouvel ordre puisse à nouveau abriter et fédérer le sens commun.  Après la religion,  le pôle de l'ordre du monde occidental me semble être "le progrès" abrité derrière l'alibi de la raison (la raison est un alibi parce que cet ordre là est foncièrement de nature religieuse). C'est ce que tout le monde pratique au quotidien. Nous sommes curieux des nouveautés, nous avons (avions) foi dans l'amélioration de notre condition. Une concurrence est en train de naître entre le progrès et l'écologie pour occuper la place centrale de l'ordre. Le progrès et l'écologie ne sont pas opposés par nature, quand bien même le visage du progrès s'est jusqu'ici assez peu soucié d'écologie. Certains progressistes acharnés (C. Allègre, J. Attali par exemple) ne supportent pas la moindre remise en question du progrès comme l'atteste leur position résolue contre tout principe de précaution. Certains adeptes de la décroissance sont contre le progrès et se positionnent parfois en prêtres verts. D'autres (dont je fais partie, cf Bernard PERRET dans "Le capitalisme est-il durable") souhaitent redonner sens au progrès, le restaurer en tentant de l'orienter vers des pratiques équitables et respectueuses de l'environnement. Qui l'emportera? Le caractère fondamentalement religieux de l'homme donne toute sa chance à la prise de pouvoir des prêtres verts qui n'attendent qu'une crise écologique majeure pour lever les forces populaires favorables à une reprise en main autoritaire sur lesquelles ils pourront s'appuyer. Les pôles autoritaires existent en France, bien qu'ils n'aient que très rarement dominé la situation politique. La démocratie peut aussi réussir à se combiner avec l'écologie et même y trouver quelques synergies (JP Fitoussi avec sa "Nouvelle écologie politique", nouvelle pour lui qui a plutôt été jusqu'ici un adepte de la croissance). C'est que l'écologie renvoie très fortement au "nous" et qu'elle a le potentiel de rééquilibrer le "je" qui tourne en rond. Le grand Manitou aurait-il fécondé la société occidentale du progrès dans sa marche vers l'ouest? Le marché et la démocratie ne me semblent pas être aussi fondamentaux que le progrès pour définir l'ordre auquel nous croyons aujourd'hui. Le libre échange s'oppose sans doute même à la démocratie à cause de ses effets inégalitaires puissants; il s'oppose aussi en partie au progrès dans la mesure où les classes défavorisées se demandent alors pour qui elles poussent à la roue du progrès, ce qui signifie que, dans ces conditions d'inégalités ou une part de la population voit sa condition s'améliorer au DETRIMENT de l'autre, leur adhésion au progrès est mise en cause. L'individu, bien que fortement associé au progrès, me semble être une impasse narcissique (onaniste?), je suis donc en désaccord avec l'humanisme narcissique défendu par Luc Ferry dans "L'homme Dieu". Selon moi, si on veut poursuivre l'expérience française imprégnée d'une combinaison de liberté et d'égalité, je crois qu'il faut rechercher un équilibre entre le je et le nous, sans sacrifier aucun des deux, développer les deux en synergie, rechercher l'équilibre du Jenous en accord avec l'homo democraticus, cela peut s'appeler l'équité ("être soi et être avec les autres" selon la formule de Jacques Généreux). Dans cette optique, une mesure alternative au PIB qui prenne en compte les aspects écologiques et l'équité sociale me semble souhaitable.
    2. Le pôle de la force au service du pôle de l'ordre. Traditionnellement, il s'agit de l'armée et de la police, aujourd'hui fortement concurrencées par l'argent. Il n'est pas choquant que les prètres bénissent les canons dans cette vision globale de l'organisation des sociétés. L'activité économique, traditionnellement dans le pôle de la fécondité, joue aussi un rôle expansioniste de l'ordre moderniste que certains disent néocolonialiste (ce qu'il fait qu'ils passent à côté de l'essence et de la capacité de séduction du progrès, en particulier auprès des jeunes). On parle de capitaines d'industrie, de guerre économique etc... La puissance que confère l'argent trouble les fonctionnalités dans la mesure où elle apporte une forte autonomie sans toutefois se déclarer à visage découvert en tant que pôle de l'ordre, mais sans croissance, sans croyance dans le progrès, pas de profit et pas de puissance financière. La richesse, qui a sa place dans la troisième fonctionnalité, tente de gravir les échelons et d'atteindre le pôle suprême de l'ordre. Y a t'il erreur d'aiguillage? Une force "faible" concourt au maintien de l'ordre, il s'agit de l'autocontrôle social, le contrôle que chaque individu opère plus ou moins à son insu sur son entourage, ce qu'il considère comme normal, l'habitus en action.
    3. Le pôle de la fécondité, des nourritures et des biens. C'est toute la base de la production des richesses, qu'elles soient économiques, sociales, éducatives, reproductives. C'est ce domaine qui est essentiellement visé par les réflexions de ce blog, avec une proposition d'organisation en trois sous-structures principales: un domaine affectif, un domaine productif et un domaine social. Ces trois sous-structures existent déjà, mais elles ne me semblent pas assez clairement définies et développées pour prendre en compte l'évolution individualiste où le chemin de la liberté nous a conduit, les formidables gains de productivité qui devraient réduire le temps productif et alimenter le temps social, prendre en compte l'accès massif au domaine productif des femmes et le vieillissement de la population.

    La politique qui cherche son autonomie en défendant la séparation de Dieu et de César est aussi aliénée que le reste de la population au mythe du progrès. On peut voir cette tentative d'autonomisation comme une barrière mise entre l'ordre religieux ancien et l'ordre moderniste nouveau. La justice qui se situe entre le pôle de l'ordre et les forces de l'ordre joue le rôle de l'assurance qualité plus que comme un élément de structure propre (biblio sur la position et les analyses de Dumézil à consolider sur ce point), alors qu'il est un des éléments centraux pour différencier l'état de droit de l'empire, ainsi que le travail de Blandine Kriegel nous le révèle brillamment.

     

     

    La partie qui suit est en chantier. Merci de vos réactions.

    Le pôle du sens qui transcende la société et que j'ai identifié au progrès ne se confond plus avec un besoin spirituel ou mystique qui habite chacun de nous avec plus ou moins d'intensité. Si la religion a occupé un rôle de pôle de l'ordre complet, total, incarnant à la fois la finalité sociale et nourissant les préoccupations spirituelles, le progrès ne lui arrive pas à la cheville car il ne remplit que le rôle de plus petit dénominateur commun social orientant nos activité. Les croyants en progrès sont rarement aussi illuminés que des croyants religieux peuvent l'être (à de rares exceptions près). C'est que le progrès s'appuie sur la raison qui tempère sa puissance idéologique et il ne peut prétendre dépasser une certaine intensité de foi, il ne peut répondre au mystère de la mort et de la vie. La principale puissance du progrès réside dans un fort pouvoir de séduction et dans une idéologie de la liberté. Il ne remplit pourtant pas le besoin mystique fondamental qui nous anime, le besoin de se sentir autre chose qu'une simple mécanique, qu'un simple objet. Le sentiment océanique, auquel Freud n'entendait rien, qui nous relie (relier=religion), est relié à chacune de nos âme (je suis agnostique mais je ressens parfaitement ce sentiment océanique qui unit l'humanité et le monde dans lequel nous baignons, ce sentiment océanique nous prédispose à accueillir la nouvelle idéologie dominante qui sera fortement teintée d'écologie). La chronique de Catherine Clément intitulée "Qui sont nos propriétaires" et que je vous livre en entier ci-dessous parle de Dieu (des dieux) et illustre  de façon originale l'universalité de la préoccupation mystique qui nous anime.

     

    Qui sont nos propriétaires ? par Catherine Clément 29/10/2008 sur les matins de FC

    L'autre jour, j'écoutais Tobie Nathan parler en public des mondes nouveaux construits par les Africains en exil. Ethno-psychologue, Tobie Nathan a fondé à l'Université de Saint-Denis une consultation pour soigner en région parisienne les migrants qui n'ont plus de repères. En assistant à cette consultation, j'ai compris que le trouble a toujours la même cause: un rite négligé, quelquefois oublié, quelquefois méprisé, un rite appris dès l'enfance dans le pays d'où l'on était venu. Mon ami Tobie a une façon très particulière de parler des souffrances engendrées par le rite oublié : il dit que les propriétaires rappellent leur existence et viennent toucher le loyer.

    Propriétaires de quoi ? De vous, de moi et d'eux, les migrants. Qui sont-ils ? Les propriétaires sont les dieux des humains - prudemment, Tobie ne parle pas des dieux, il dit "les Etres". Les Etres ! Entendez-les avec une majuscule; c'est ainsi qu'on comprend que ce sont bel et bien des dieux. Pour une athée comme moi, c'est étrange, mais il est vrai qu'on est rarement athée à la naissance : l'athéisme est plutôt une position construite dans l'âge adulte. Prenons un exemple. Une jeune marocaine, très diplômée, indifférente à la religion, très bien insérée, pourvue d'un travail, vêtue d'un tailleur et bien sûr, cheveux libres, est la proie de malaises inexpliqués. Examens négatifs, même les plus sophistiqués. Elle retourne au Maroc. Puis un soir, elle tombe et s'affaisse, en transe. C'est là que tout se joue. Si l'on dit "en crise " et qu'on pense hystérie, on se trompe de monde. L'hystérie est un vieux symptôme européen, plutôt "vintage", d'ailleurs; un très très vieux symptôme. Mais si on dit "en transe", on a une solution. La transe signale qu'un djinn s'est emparé du corps. La mère de la jeune femme a fait le nécessaire et elle a consulté une thérapeute traditionnelle pour accomplir le rite négligé. Rapidement résumé : des versets du Coran écrits sur du papier, plongés dans l'eau : les écritures sacrées une fois bien dissoutes, la patiente avale l'eau. Elle ingère le sacré. Elle se réintègre, elle guérit. Le djinn est satisfait : car le propriétaire, c'est lui. Il n'en demande pas plus. La jeune femme ne change pas de mode de vie. Simplement, elle s'est reliée au territoire dans lequel elle a été élevée.

    Jusque là, tout va bien. Chacun peut retrouver son rite. Mais Tobie Nathan a pris un autre exemple, terrible. C'est un jeune congolais de 17 ans, ancien enfant-soldat. A 7 ans, il a été razzié par des milices armées pour ce genre de guerre civile qui dévaste l'Afrique d'aujourd'hui. Pour lui faire perdre la mémoire de sa petite enfance, tout est bon, y compris l'obliger à tuer ses parents. Table rase et terreur. On lui donne une petite mitraillette, l'enfant devient soldat, il tue énormément. Un jour, cela s'arrête et le voilà en France. Que faire avec lui ? Il n'a pas de mémoire, pas d'éducation, il sait tuer, il est en proie à des crises violentes et les services sociaux ne savent pas comment faire. Une thérapie par la parole ? Ca ne marche pas. Aucune thérapie ne marche; cela se comprend. Un jour, il trouve une solution. Où ? Dans une église évangélique. Les crises dont il est la proie deviennent des transes avec illuminations; il s'apaise. Il a trouvé un nouveau propriétaire, qui n'est plus tout à fait le Jésus du catholicisme, ni du protestantisme, mais un Christ nouveau, un nouvel Etre. Désormais, l'ancien enfant soldat lui paiera son loyer en suivant le culte de l'église évangélique, dont on sait qu'elle progresse à une vitesse éclair un peu partout dans le monde, en Amérique latine et maintenant, en France, dans les banlieues.

    Il y aurait donc maintenant de nouveaux Etres apparaissant à la faveur des guerres qui, elles aussi, prennent de nouvelles formes, car les enfants-soldats sont d'invention récente. Est-ce ainsi qu'il faut comprendre la progression fulgurante des églises évangéliques ? Je crois que oui. En leur donnant un propriétaire, ces églises sont apparemment capables d'intégrer des humains complètement égarés, des enfants meurtriers qu'on a volontairement privés de parents, d'enfance, de passé et d'appartenance. Choquant ? Moins que de laisser ces humains dans l'état criminel où on les a plongés.

     

     

  • Le trou démocratique et le débat sur les départements

    Supprimer les départements est une réponse au lieu commun qui dit que la France comporte trop de niveaux administratifs. Entre l'état et la commune, il y a la région, les départements et les cantons, ce qui fait 5 étages. Si on fait une analyse complète de la société, il faudrait ajouter l'individu ou plutôt le citoyen (ou la famille ou groupe de vie qui est le lieu ou les échanges quotidiens ont lieu et qui peut à ce titre être considéré comme l'échelon politique de base). D'un point de vue quantitatif, on a 26 régions pour un état, 4 départements par région, 44 cantons par département et 8 communes par canton. Soit quelques unités à quelques dizaines d'unités d'un niveau à l'autre.

     

    Mais il y a environ 1700 individus en moyenne pour une commune (soit environ 500 familles si on se réfère à ce critère). Cette fois la proportion n'est plus de quelques dizaines mais de quelques centaines. Il y a donc ici une rupture, un trou démocratique, entre d'une part les élites et les professionnels de la politiques qui sont capables de décoder les enjeux des choix politiques à faire et d'autre part les individus dans leur ensemble manipulables parce qu'isolés. Il y a un trou entre ceux qui ont prise sur l'actu, qui en font partie et ceux qui la subissent. L'explosion des NTIC (nouvelles technologies de l'information et de la communication) permet à des groupes de réflexion, des forums en tous genres de combler en partie ce vide. La démocratie participative se forme cahin caha en dehors des cadres institutionnels, sans accéder à une maturité suffisante pour devenir délibérative. Cette question du trou démocratique me semble mériter une attention beaucoup plus grande que l'actuel débat sur les départements lancé par le "plan" Attali. En effet, comment expliquer le hiatus qui s'est formé entre les classes dominantes, politiques, économiques et médiatiques appelant très majoritairement à voter pour le oui au projet de constitution européenne en 2005 et le succès sans réserve du non?

    Entité Nombre d’entités Nombre moyen de personnes par entité
    Etat 1 63000000
    Région 26 2423077
    Département 100 630000
    Canton (4500) 14000
    Commune 36000 1750
    Citoyen 63000000 1