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  • TVA Sociale, effet sociétal positif, injustice ajustable.

    TVA sociale, TVAS, question à réfléchir. Les sources de revenu social de l'état providence redistributif (ou l'état social pour ceux qui préfèrent) peuvent s'appuyer sur trois assiettes: le producteur (prélèvement actuel), le consommateur (TVA sociale), les revenus (CSG). Que choisir? La TVAS offre une alternative de prélèvement indirect intéressante dans une optique d'équilibre entre prélèvement direct et prélèvement indirect. Il est de notoriété publique d'affirmer que la TVA est l'impôt le plus injuste. Un moyen très simple d'ajuster l'injustice (la non progressivité) inhérente à la TVAS et de la corriger serait d'accorder à tous un crédit d'impôt sur la consommation  unique (CICU). Plus les revenus sont bas et plus ce CICU couvrirait la cotisation TVAS. Cette solution de CICU a ma préférence comme moyen de piloter à gauche ou à droite la TVA. Un autre moyen de pilotage social de la TVAS serait de moduler les taux en fonction du niveau de nécessité des produits (première nécessité, intermédiaire, luxe). Mais ce moyen est plus compliqué et catégorise les produits d'une façon intrusive vis à vis de la liberté de choix des personnes. Par contre, des taux différents de TVA peuvent être mis au service de choix économiques. On peut par exemple appliquer un taux bas pour les produits ou service qu'on veut promouvoir, comme les énergies durables, les produits bio ou durables etc...La TVA peut donc servir à réguler la consommation (alors que l'IR est adapté à la régulation des revenus). Il ne serait pas interdit, par civisme, de renoncer à ce CICU pour les plus fortunés pour qui cette CICU ne représenterait qu'une obole. Il est aussi possible et efficace de n'accorder cette CICU qu'au 1/3 ou au 1/4 des citoyens ayant les revenus les plus faibles sans que le CICU perde son sens.

    Quand les prélèvements se font sur le travail comme aujourd'hui, ces prélèvements se retrouvent intégralement dans les prix des produits ou services, ce qui n'offre aucune caractère de progressivité à ces prélèvements sur le travail. Donc, dire que la TVAS serait plus injuste que le mode actuel est faux.

    En ce qui concerne la mise en place de la TVAS, l'ensemble des cotisations peuvent être remplacées ou une partie seulement. La TVAS désigne donc une famille de projets. Globalement, les syndicats d'employés sont défavorables à une TVAS. On ne peut ignorer que le basculement des financements sociaux de la production à la consommation pourrait s'accompagner d'une perte de contrôle des syndicats sur la gestion des caisses de retraite et de maladie. Leur position est donc brouillée avec la question de leur pouvoir.

    Les simulations de TVA sociales faites par le gouvernement en 2004 ne sont pas vraiment concluantes, c'est le moins qu'on puisse dire. Voici une autre évaluation beaucoup plus positive et très bien exposée émanant d'un spécialiste de l'entreprise et des organisations. L'avantage de la TVAS sur le mode actuel de prélèvement sur la production ne serait pas seulement social mais aussi sociétal dans la mesure où nous sommes tous consommateurs alors que le taux actifs/population décroît. Transférer les prélèvements sociaux du travail vers la consommation peut donc avoir comme effet principal de désamorcer un conflit de générations. L'acceptation d'une taxe ou d'une cotisation est d'autant meilleure que la proportion de contributeurs est large.

    Les territoires français ne sont pas en situation d'égalité. La très forte augmentation de la mobilité opère un découplage entre zones productives et zônes de consommation. En particulier, les grandes agglomérations sont très compétitives et bien intégrées dans l'économie mondiale, alors que les autres secteurs vivent plus de redistribution et de tourisme. Laurent Davezies et Pierre Veltz analysent finement cette situation ou l'état providence entre les diverses zônes opère une véritable redistribution géographique. Brancher les ressources sociales sur la consommation serait donc une façon de réduire les tensions qu'une telle situation d'inégalité territoriale engendre.

    Question pratique: il semble qu'il serait beaucoup plus adroit d'appeler cet impôt CSVA (Cotisations sociales sur la valeur ajoutée) ou CVA ou CSC (cotisation sociale sur la consommation) plutôt que taxe. Les taxes sont assujéties aux réglementations internationales, européennes...alors que les cotisations ne le sont pas. Impôt sur la consommation (IC) aurait aussi l'avantage d'être plus clair sur ce qu'il désigne.

    Autre point positif rarement évoqué, la TVAS permet à chaque consommateur de moduler immédiatement son taux de cotisation en fonction de ses ressources. En période de vaches maigres, il est possible individuellement, sans attendre une quelconque mesure venue d'en haut, de se limiter au strict minimum et quand ça va mieux d'ajuster ses dépenses (bien entendu ce n'est valable que si le niveau de ressources demeure au dessus d'un certain plancher, mais cette remarque vaut quel que soit le mode de prélèvement). La mise en oeuvre d'une TVAS modifierait le mode de financement de l'état providence, le faisant passer de corporatiste ou conservateur à socio-démocrate (selon le classement de Gosta Esping-Andersen ) puisque nous sommes tous consommateurs. Ce mode de financement socio-démocrate est en général plus favorable à l'intérêt général contrairement à notre système actuel qui favorise les acquis des cotisants et le pouvoir des syndicats et est donc pour ces raisons conservateur et corporatiste.

    D'un point de vue économique, la TVAS agirait comme une dévaluation de la monnaie lors de sa mise en place. C'est la principale critique économique des opposants qui voient dans ce geste une agression vis à vis des autres partenaires de l'Union Européenne. Il me semble que cet outil pourrait au contraire amener un peu de souplesse et de pouvoir aux états dans le gestion de la spécificité et de la conjoncture de leurs besoins sociaux et économiques (souvent réclamée par les mêmes opposants à une TVAS). Après une période de grogne, il me semble fort probable que tous les états de l'union finiraient par mettre en place un tel outil d'autonomie de leur financement social. Une telle mesure à l'échelle européenne jouerait comme une protection des systèmes sociaux et également comme un avantage compétitif pour les entreprises de la zône vis à vis du marché intérieur.

    Parallèle TVAS et exception culturelle: la gauche (celle de Fabius au moins) a utilisé la TVAS comme arme électorale entre les deux tours des législatives 2007. Or, le parallèle TVAS (ou plutôt Cotisation sociale sur la consommation) et exception culturelle bien défendue par le PS met en évidence une contradiction idéologique. Citons Wikipedia sur l'exception culturelle: "Dans chaque branche (cinéma, théatre, télévision, ou autres moyens de communications), il y a un système d'aide automatique à la création. C'est ainsi que le CNC (Centre national de la Cinématographie) qui prélève un petit pourcentage sur tout billet de cinéma, peut, grâce à cet argent, apporter des aides à l'écriture, à la création ou à la diffusion d'œuvres d'expression française." Il n'est pas très difficile de transposer ce mécanisme pour financer très légitimement nos besoins sociaux. Un prélèvement serait effectué sur chaque consommation et réinvesti dans la création de capital social d'où origine toute notre vitalité à long terme.

    Le rapport capital travail est au coeur de la vie économique. Les fortes ponctions opérées sur le travail incitent à plus rémunérer le capital au détriment du travail de façon à limiter ces ponctions. La TVAS réduirait la charge sur les salaires et agirait donc à l'avantage du salaire, dans la mesure où les rentes du capital servent aussi à consommer. La TVAS agit donc dans le même sens qu'un accroissement des prélèvements sur les rentes du capital.

    Parmi les variantes de prélèvements sur la production, on trouve la CSPM, cotisation sur les produits manufacturés. Contrairement à la TVA, à la place de se revendre les produits hors taxes jusqu'au consommateur qui lui, paie la TVA, les producteurs et acteurs de l'économie se facturent biens et services taxés CSPM (sauf cas d'exemption pour les produits et services qu'on veut favoriser) et emplissent directement les caisses sociales. En contrepartie, les cotisations sociales (au moins la part salariale) sont réduites ou supprimées. La présentation qui en est faite est franchement protectionniste, c'est à dire que les biens et services produits en France en sont exonérés. A méditer.

    Le principal inconvénient que je vois à la TVAS est qu'il lie notre état providence, notre protection sociale, à la consommation. Or, il est de plus en plus clair que notre modèle de croissance n'est pas viable à long terme, en premier pour des raisons écologiques évidentes et en second pour des raisons sociales (on ne peut construire une société sur le culte d'un l'individualisme égoïste, c'est à dire sur la consommation). Voilà une raison de plus de militer pour l'état providence participatif qui est beaucoup plus indépendant des aléas de l'économie mondialisée.

  • Assistance contractuelle

    Dans un monde marchand réel, la concurrence n'est jamais complètement libre et non faussée. Si le libéralisme affaiblit les rentiers et les privilégiés dans un premier temps, on peut se demander s'il ne joue pas le rôle de bretelle d'accès au conservatisme financier. Le renard libre dans le poulailler libre finit toujours par voir le renard dominer la situation.

    Un des rôles de l'Etat Providence Participatif (le troisième pilier) est de mettre la connaissance au service de structures collectives ouvertes. Faire des choix passe par une bonne maîtrise des enjeux et des contrats. Dans un monde marchand, les dominés sont influencés par des médias eux-même sous l'emprise des dominants; les cercles de relations des dominés manquent souvent de compétence juridique, politique, .... Un parti de gauche se doit de promouvoir le développement d'outils d'aide à la formation du jugement et au choix. Il peut s'agir de médias (journaux, télé, radio), de forum internet spécialisés, d'associations de consommateurs. Dans l'esprit de l'Etat Providence Participatif, cette activité pourrait entrer, au moins pour la partie associative, dans le champ de l'activité sociale ou socio-culturelle (rappel: dans l'Etat Providence Participatif, la norme est d'avoir deux métiers, un métier productif ou le critère de productivité domine et un métier social ou le critère relationnel domine).

  • Marché productiviste et marché social.

    Quand José Bové lance "le monde n'est pas une marchandise" il disqualifie le principe de marché en amalgamant un mouvement productiviste capitaliste envahissant et le principe de marché. Ce point est très important pour comprendre ce blog libéral solidaire et pas néolibéral. En effet, une des principales distinctions faites dans ce projet d'Etat Providence Participatif passe par la distinction entre une activité qui met en oeuvre une démarche à dominante productiviste en phase avec un système monétaire capitaliste et une activité à dominante relationnelle sociale (ou plus précisément non utilitariste -quel mot utiliser? sociale) en phase avec une monnaie fluide ou fondante. La démarche productiviste est utilitariste, elle consiste essentiellement à améliorer la productivité, à réduire le temps passé à faire quelque chose (privé ou public). Une démarche relationnelle sociale (privé  ou public) n'est pas utilitariste, le gain de temps ou de productivité n'y a que peu de sens, l'investissement matériel n'y a aucun intérêt et c'est pour celà que la monnaie capitalisable n'y est pas adaptée.

    Aucune de ces deux optiques n'est antagoniste avec un principe de marché, c'est à dire de demande libre dans la mesure de ce que peut fournir le marché et d'offre libre de ce qui est permis. D'autre part, il y a des activités productivistes dans le giron de l'état, surtout quand le principe de concurrence est inefficace et bien entendu dans le privé quand la concurrence est effective. Les activités relationnelles peuvent se répartir entre public et privé suivant les cas de figure et le besoin en maillage du territoire. On peut avoir des assistantes sociales attachées au service public et des associations en concurrence sur un marché relationnel (on peut bien choisir le club de foot où on souhaite jouer par exemple).

    Cette distinction entre productivisme et relationnel ou social me semble plus efficace pour repenser l'organisation sociale que la distinction, plus usuelle aujourd'hui,  entre marchand et non marchand (aucune catégorisation n'est indiscutable, mais les catégorisations actives jouent un grand rôle dans nos orientations politiques).

     Remarque: dans beaucoup de notes de ce blog, écrites avant celle-ci, le mot marchand est souvent employé abusivement pour désigner la démarche productiviste.

  • Economie des biens symboliques, domaine public et liberté, égalité, fraternité.

    Le fond politique qui m'anime peut se résumer ainsi: faire vivre, renouveler "liberté, égalité , fraternité" comme un processus, comme un mouvement, comme un horizon plutôt que comme un but qui serait tout de suite obsolète. 

    A cette fin, je suis particulièrement attentif au domaine public. Je tiens Pierre Bourdieu pour le plus grand économiste de notre temps avec sa notion "d'économie des biens symboliques" qui me semble indépassable. Les médias sont aujourd'hui les banquiers de cette économie des biens symboliques. C'est là que s'y distribuent les bons et les mauvais points. Ils sont, à ce titre, une partie du domaine public, de l'Agora. On peut analyser l'histoire comme celle de la convoitise et de la prise de pouvoir du domaine public. Les religieux ont longtemps occupé le terrain, la bureaucratie s'en est emparé sous le joug dit communiste et il nous en reste quelques vestiges importants, les militaires le possèdent ici et là, les médias occupent fortement ce terrain dans les démocraties avancées et les marchands qui l'ont compris tentent de s'emparer des médias. Faire vivre notre devise, c'est faire en sorte que personne ne possède ce domaine public, que personne ne se l'approprie, mais que tous les acteurs y aient accès, qu'ils puissent y puiser dans l'échange leur énergie et leur valeur, que cette banque des biens symboliques soit la plus généreuse possible pour tous. La rénovation politique que j'appelle de mes voeux préconise d'abandonner tout ce qui viendrait entraver notre devise et la domination d'une quelconque partie de la société sur le domaine public. Ce domaine doit en quelque sorte être sacralisé et ouvert à tous (participatif). Ne laissons pas le règne des marchands alliés aux médias s'enraciner et faire d'eux les alliés objectifs d'une prochaine révolution, réformons plutôt.