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Comment l'exclusion génère des born-again, tentative de décodage.

Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il y en a, des born-again (nés à nouveau), des illuminés, et qu'ils se sentent alors investis d'une mission. La forme et sans doute le nombre varie avec les époques, avec les illusions disponibles.

L'ingrédient principal pour être candidat à la renaissance missionnaire: ne pas trouver sa place et en éprouver en conséquence un sentiment de vide intérieur, c'est humain, c'est cohérent avec notre qualité d'être social. Les principales composantes de cet ingrédient: avoir un manque affectif qui est équivalent à ne pas avoir reçu un accueil pertinent dans son tout jeune âge (être mal "mis au monde", comme nous tous à des degrés divers et sans doute aussi "mal éduqué", comme nous tous à des degrés divers, cad mal résister à ses pulsions); être dans une société qui offre peu de places (sans doute accentué si la distribution des places est discriminante selon des critères ethniques, religieux ou même politiques); ne pas disposer de perspectives d'avenir (les places dans le futur). Il me semble que nous faisons carton plein sur les 3 composantes.
Pour que ce potentiel de born-again se réalise, le plus souvent vers l'adolescence ou la jeunesse, il ne manque plus que la rencontre (un prosélyte sincère ou manipulateur, un livre, un film, un forum internet...) qui arrivera à point et saura exploiter ce manque, ce vide, et apparaître crédible dans sa capacité à le combler.
Prévenir politiquement le terrorisme consisterait donc essentiellement à prêter toute notre attention et nos efforts à offrir des places et des perspectives, en un mot, un sens. Le cadre de la laïcité me semble tout à fait adapté, parce que c'est celui qui est le plus apte à métaboliser les informations au détriment des idéologies et des rigidités dogmatiques. Mais il impose une exigence d'accueil très élevée, puisqu'il ne s'appuie pas sur les éventuels bienfaits d'un au-delà capable de réparer toutes les injustices terrestres. Cette responsabilité politique n'a rien de facile à ce moment de multiple crise (crise des valeurs liberté+progrès, relation de domination/soumission encore très courantes, crise de l'avenir/écologie, point culminant du cycle de concentration des richesses, mutation rapide du travail avec la révolution numérique/informationnelle...). Il nous faudrait accomplir une révolution politico-culturelle peut-être hors de portée, passer de la mise au centre des luttes interpersonnelles à la mise au centre des problèmes d'adaptation si nombreux à résoudre, à plus d'intelligence collective. Se focaliser sur le volet répressif, aux effets d'annonce en cours, pourra peut-être limiter un peu les dégâts qu'ils pourraient causer, mais ne parviendra pas à limiter la génération de born-again et leur détermination missionnaire, faute de remédier à leurs causes: le manque de places et de perspectives.

Note: Pour développer cette hypothèse, je me suis basé sur un long interview de deux amis born-again assagis qui n'ont pourtant pas viré terroriste islamiste, étant des born-again catholiques, mais qui se sont bien sentis investis d'une mission, au moins pour un temps. Ils m'ont aussi confirmé ce sentiment de vide comblé par leur illumination. En grattant un peu, il ne m'a pas été très difficile de détecter leur carence affective, qui n'a rien à voir avec le statut social de leur mileu d'accueil, chaque milieu peut être le siège de la difficulté à combler affectivement ses enfants.

L'éducation ne consiste pas à apprendre aux enfants que les dragons existent, ils le savent déjà, mais elle consite à les aider à découvrir qu'ils peuvent les vaincre.

Ajout du 16/11/2015

Le 14 Janvier, j’avais écrit le petit texte ci-dessus. Je ne vois pas grand chose à y rajouter. Peut-être souligner que nous sommes des êtres sociaux, c’est à dire capables de faire bloc, soit autour d’agglomérants ethniques ou confessionnels ou soit même ethnico-confessionnels. L’histoire regorge d’exemples et de preuves de cette disposition sociale a l’opposé de la raison, capable de faire taire notre capacité d’empathie. Les « barbares » d’hier ne sont pas des extraterrestres. Il suffit de constater la ferveur et l’engagement qui peut se former autour d’une cause aussi minime que le soutien inconditionnel à une équipe de sport (le « supportisme ») pour s’en convaincre. Chacun de nous a besoin d'une place dans un cadre fraternel, faut-il le rappeler?

 

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