Patrons de gauche, révoltez-vous!
Après ce premier tour des élections régionales très largement remportées par les abstantionnistes, je me pose la question du pourquoi tant de désintérêt? Il y a toutes les raisons habituellement évoquées et sur lesquelles je ne vais pas en rajouter une couche (faibles enjeux de ce scrutin, crise économique discréditant tout le corps politique, beau temps, ouverture de la pèche...). Je me suis mis à la place d'un patron de gauche (il y en a), ou même de centre droite soucieux des gens et des facteurs sociaux, je me suis demandé pour qui j'aurais voté et je me suis alors trouvé dans l'embarras.
A très gros traits, je ne peux me ranger aux côtés d'une UMP qui, malgré ses coups de menton, laisse libre cours aux jeux financiers qui se jouent contre l'activité économique et donc contre l'emploi.
Je ne peux non plus pas adhérer aux propositions du PS qui n'en finit pas de résoudre ses contradictions vis à vis de l'entreprise. Il faut alléger l'entreprise des charges qui pèsent sur elles par un déplacement fiscal vers les individus. La position du PS vis à vis de la TVA sociale est emblématique d'une gauche qui n'a pas pris la mesure de la mondialisation des échanges, qui vit dans le passé. Elle reste anti-patron de n'avoir pas encore digéré l'utopie d'une société sans hiérarchie, c'est à dire d'une société sans capacité de décision. Avec une telle philosophie politique archaïque, comment pourrait-elle réformer les retraites qui en ont pourtant besoin? Comment pourrait-elle réformer le financement de la santé? Peser ainsi sur le travail alors que moins d'une personne sur deux y contribue, c'est se condamner à perdre encore des emplois et se fermer la porte d'une véritable social-démocratie partagée, assise sur une assiette large de contribuables.
Que feront les écolos? Vont-ils aussi se ruer sur l'entreprise avec un tropisme fiscal décalqué de la gauche?
Je demande aux patrons de gauche, ceux qui se défoncent pour l'emploi digne et durable, qui savent que la prise de décision est indispensable à tout groupe, de se révolter contre cette classe politique de gauche qui les amalgament avec les eaux troubles financières. Il faut fermer le casino des jeux spéculatifs, mais on a besoin d'investissements. Prendre aux riches pour donner aux pauvres est une fausse piste, une piste victimaire de gauche, il faut empècher les riches de plumer les pauvres et agir à la source. Alors pour qui voter quand on est un patron de gauche aujourd'hui?
Commentaires
Tu me fais penser à ce "petit patron", face à George Marchais, "coco encarté", stalinien résistant, qui lors d'une réunion a pris le micro et a dit vertement qu'en entendant le discours de la "gauche unie", il voyait rouge !
Et quand il voyait rouge, il racontait que c'est parce que le sang lui montait à la tête et qu'il n'avait qu'une seule solution pour évacuer la tension, c'est de filer des "coups de pieds au kul", comme il en recevait de son père quand il était jeune.
Toute une époque passe sous notre nez : la gôche se retrouve dans les allées du pouvoir de la droâte : ils appellent ça "ouverture".
C'est juste parce que la gôche est morte au profit des écolos : ainsi en a décidé le peuple de gôche et ses représentants élus.
Dommage : il y avait tant à faire !
Les écologistes veulent que la Banque Centrale Européenne ouvre les vannes du crédit aux Etats pour que ceux-ci finacent des emplois associatifs. Va voir sur le site d'Europe écologie, ou sur l'article que j'ai consacré à leur programme. L'entreprise, ce n'est pas leur problème.
Où sont les patrons de gauche? Je demanderais plutôt: où est le monde réel? Nous sommes gouvernés par la haute bourgeoisie, à gauche ou à droite, qui ne connait pas le monde réel. En économie, les théoriciens sont anti-libéraux, ou se perdent dans de grands modèles mathématiques, keynésiens, monétaristes, ou synthétiques, qui sont coupés du monde réel. Alors, ce que peut faire le péquin moyen pour gagner sa croûte, ce n'est pas leur problème. C'est trop concret. Nous n'avons même pas les outils pour réfléchir aux vrais problèmes des gens. J'ai même un sujet de thèse: refonder l'économie. Avec une réhabilitation de ce qu'on appelait l'économie politique. Mais faudrait trouver un directeur de thèse assez iconoclaste pour acceptet ça.
Tu es un idéaliste, ouvert au débat. Il faudrait que tous les idéalistes puissent se rassembler. Cela ferait le pus grand parti de France. Est-ce que ce sera possible grâce au net? C'est le principal, espoir, finalement. Car les médias classiques ont une bien faible analyse.
Vladimir,
Et si tu proposais à Paul Jorion ou à Jean Gadrey d'encadrer ta thèse? Ils sont sur cette longueur d'onde. Je suis certain qu'Incognitototo serait capable de le faire, par contre il n'a pas pignon sur "économie" pour le faire, mais tout dépend de ce que tu veux faire, "une thèse" ou "une thèse reconnue par le milieu académique"?
Pour ce qui est des médias classiques, il faut regarder du côté du canard et parfois Libé, Alternatives économiques qui a un statut indépendant (Scop). Voilà encore un sujet démocratique important, l'indépendance des médias vis à vis de toute autre activité.
Le temps te garde de la fatigue et du découragement dans ta démarche de découverte de l'économie politique et des gens qui la font. Je me suis donné comme principe de ne pas nourrir le Bouc-Émissaire car c'est un ingrat.
Donne à manger au Bouc-Émissaire et il chiera des crottes dans tes bottes - dicton du jour!
C'est une thèse pour mon plaisir. J'ai une maturité d'esprit que je n'avais pas quand j'étais étudiant. Intellectuellement, j'aime cogiter sur l'économie. Effectivement, Jean Gadrey ne serait pas d'accord avec mes conclusions, mais en accord avec ma démarche. C'est quelqu'un de respectable. Comme tu le constates, j'ai été son élève, mais il ne m'a pas endoctriné,et je ne me suis pas rebellé non plus contre lui. C'est un bon professeur.
Alter éco est marqué idéologiquement. Je les respecte, mais je ne suis pas d'accord avec eux. Tu sais, l'économie se cherche, en fait. Elle veut être scientifique, d'autres la veulent sociale. Ou socialiste. Les économistes autrichiens, qui sont les plus complets sur le sujet, ont négligé l'aspect social. Non par désintérêt, curieusement. Plutôt par manque de temps.
Je vais cogiter tout ça. Merci pour tes remarques. C'est vrai que je me lasse parfois. Mais j'ai un sale caractère: je finis toujours par recommencer à râler!