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Laïcisation plutôt que laïcité, processus vital.

La laïcité à la française, celle soutenue par Gilles KEPEL, est une laïcité intégratrice aboutissant à un rognage culturel intense. De cette conception rigide on peut rapprocher les slogans du type: "La France, tu l'aimes où tu la quittes".

Si on considère la laïcité comme un processus en cours, comme une laïcisation, une auberge espagnole politique, la recherche de la tolérance, un regard mal assuré et critique sur ses propres exigences, il devient alors possible de convier toutes les minorités, toutes les cultures à se métisser, à créer un espace où vivre ensemble. Celà n'est possible qu'à condition qu'aucune des cultures présentes ne souhaite dominer les autres. Cela suppose qu'aucune des cultures présentes ne soit convaincue et ne proclamme détenir la vérité. La créolisation, pour laquelle milite le grand écrivain de la Martinique Edouard Glissant, et la laïcisation peuvent alors converger vers un même processus d'élaboration de l'espace public.

Notre laïcité à nous est devenue brutale d'avoir émergé de la brutalité d'un pouvoir religieux dominant, dominateur et exterminateur. Ce faisant, notre laïcité devenue froide est en train d'échouer à intégrer les nouveaux arrivants et elle est en train d'échouer à contrebalancer l'individualisme et l'isolement. Pourtant, ce n'est pas faute d'y avoir mis les moyens. L'état providence, avec les allocations familliales, la sécurité sociale, les allocations chômage, l'école obligatoire gratuite, n'y suffit pas, n'y suffit plus. Des pans entiers de la société se trouvent exclus et vont se réfugier dans le trafic, sombrent dans la déchéance, où cherchent un réfuge identitaire.

Rénover l'état providence a été et est encore ce qui motive ma démarche. Mais l'opposition farouche, la mécompréhension persistante sur les intentions pacifiques de principe d'organisation de l'hospitalité d'une loi comme la loi sur les signes religieux à l'école m'indique que je dois amender ma recherche et ma vision de la laïcité. Je suis donc en route pour un périple qui va me rapprocher d'Edouard Glissant, d'Amin Maalouf, d'Amyarta Sen, de Charles Taylor (le sociologue canadien). Il me faut comprendre pourquoi nos principes de laïcité ne sont pas repris à leur compte par les immigrés, par les nomades, pourquoi ceux-ci ne participent pas au processus de laïcisation et comment aménager nos institutions et notre culture pour que reprenne ce processus vivant et vitalisant. J'espère que ma conclusion sur notre laïcité ne sera pas celle de Xavier Gral à propos de la culture Bretonne, exprimée dans son ouvrage "Le cheval couché" en réponse au livre de Pierre Jakez Hélias "Le cheval d'orgueil". Xavier Gral a bien ressenti et compris que la culture Bretonne n'était plus qu'un folklore, un ersatz de culture et il souffre de cette mort culturelle, de la mort de son identité. La laïcité trop rigide doit se muer en processus partagé, participatif, de laïcisation pour revigorer notre société moribonde.

Est-il possible d'aménager l'espace public pour que chacun y participe mais qu'aucun ne veuille le dominer? C'est le coeur de la laïcisation. Ni les prètres ni les marchands ni les bureaucrates ni les militaires ne doivent vouloir se l'approprier mais chacun doit se sentir bienvenu d'y participer. L'histoire politique peut être vue comme l'histoire des luttes pour la domination de l'espace public. Tour à tour les prètres, les tyrans, les bureaucrates et aujourd'hui les marchands ont voulu dominer ce domaine. L'histoire de la démocratie, c'est l'histoire de la lutte pour que personne ne domine cet espace. Dans ses formes radicales, la laïcité serait comme une langue morte, comme une démocratie figée. Tentons d'explorer la laïcisation.

L'Association des Tunisiens de France en montre le chemin et pas seulement pourles Tunisiens, mais pour tous les immigrés.

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